Décès et héritage : tout savoir sur vos droits de succession
En cas de décès de l’un de vos proches, quelles situations vous obligent à prendre rendez-vous chez un notaire ? Père, mère, enfant, fratrie, famille lointaine : quelles règles s’appliquent ensuite pour calculer votre part d’héritage ? Incipio vous répond grâce à l’expertise de Me Ronit Antebi, avocate à Cannes spécialisée en droit de la famille et des successions.
Les questions d’héritage nous semblent toujours lointaines. Au mieux, nous en parlons en petit comité entre deux portes sans forcément inclure dans la discussion toutes les personnes concernées. Au pire le sujet est évité, mis de côté. “Le testament ? On verra plus tard”. “Qui récupérera la maison ? Silence chronique à ce sujet…”
Pour autant nous serons toutes et tous concernés un jour par ce partage des biens liés au décès de nos proches. Quelles sont alors les règles en vigueur en matière d’héritage ? Me Ronit Antebi, avocate à Cannes spécialisée en droit de la famille et des successions nous livre son expertise.
Rendez-vous chez le notaire
Dans un premier temps, il faut “récupérer l’acte de décès, les éléments de l’état civil et aller chez le notaire pour lui confier la succession, même si bien sûr toutes les successions ne valent pas le coup d’aller chez le notaire, confirme Me Antebi. Pour justifier les formalités à effectuer, il faut en effet qu’elles représentent une certaine valeur, soit 50 000 euros ou un bien immobilier dans la succession”. Dans ce cas, le notaire va “procéder à la recherche des héritiers, poser des questions à l’héritier qui se présente, interroger le fichier des dernières volontés du défunt, regarder si un testament est enregistré au registre national. Il va également pouvoir interroger les banques pour informer du décès, clôre les comptes pour que la banque puisse transférer les fonds au notaire”.
L’acte de notoriété “est ensuite préparé pour donner la qualité d’héritiers. Ce document est important notamment en cas d’investigation, de procédures entre les héritiers nécessitant l’accès aux bilans médicaux, aux relevés de bancaire, au relevé de carrière par exemple. Sans acte de notoriété, l’administration ne peut fournir toutes ces preuves”, poursuit Me Antebi.
Le notaire fournit ensuite “les attestations immobilières, la déclaration de succession dédiée aux impôts sachant qu’il faut réagir dans un délai de moins de 6 mois”. Que se passe-t-il si ce délai est dépassé ? “Des pénalités de retard voire des majorations de 40% peuvent être mises en place. D’où l’intérêt de faire les choses au plus vite.” Reste que parfois, des conflits viennent perturber cette organisation, “avec des héritiers qui ne sont pas d’accord entre eux.

Enfants, époux, PACS et testament
“Contrairement aux Etats-Unis où tout l’héritage est attribué selon la volonté du défunt, en France, il existe des règles qui visent à protéger la conservation des biens dans une famille en priorisant les enfants”.
Ainsi, si le défunt avait des enfants, mais qu’aucun testament n’avait été rédigé de son vivant, tous ses biens vont à ses descendants (enfants, petits-enfants, arrières petits-enfants) et son époux/épouse s’il/elle était marié(e). Le testament, s’il existe, doit indiquer que le défunt réserve une partie de son patrimoine à ces mêmes descendants.
La succession doit être répartie à parts égales entre chaque enfant du défunt, et ce même si les enfants ne sont pas nés de la même mère. Cette somme sera divisée une fois la part attribuée à l’épouse actuelle. “Dans tous les cas, s’il est possible de déshériter son conjoint dans une certaine mesure, par testament authentique, il est impossible, illégale de déshériter son enfant”, affirme Me Antebi.
“Contrairement aux Etats-Unis où tout l’héritage est attribué selon la volonté du défunt, en France, il existe des règles qui visent à protéger la conservation des biens dans une famille en priorisant les enfants”, Me Antebi
L’héritage par représentation du parent
Et dans quel cadre un petit-enfant va-t-il hérité de son grand-père ou de sa grand-mère ?
- Lorsque son parent est décédé
- Lorsque son parent renonce à la succession de son propre parent défunt
- Lorsque le parent est considéré comme “indigne de succéder”, en clair lorsqu’une faute grave a été commise à l’encontre du défunt. Rendez-vous sur cette page pour obtenir toutes les informations à ce sujet.

Concernant l’union maritale
L’époux du défunt hérite systématiquement. A noter que la part successoral va varier en fonction du régime matrimonial : communauté réduite aux acquêts ou contrat de mariage. Cette part est aussi fixée en fonction du nombre d’enfants dans la couple.
Que dit le droit Ă ce sujet ?
- Si le couple a un enfant, la moitié des biens va à cet enfant
- Si le couple a deux enfants, les deux-tiers des biens reviennent aux deux enfants
- Si le couple a trois enfants ou plus, les trois-quarts des biens sont distribués aux trois enfants et plus
Le reste, appelée la quotité disponible, peut être donnée librement par donation ou testament.
A noter : aucun droit de succession n’existe pour les concubins et les personnes pacsées, sauf si bien sûr ces dernières figurent dans le testament pour disposer de tout ou partie de cette quotité disponible.
Votre part nette d’héritage
Passons maintenant à la partie calcul. Comment évaluer précisément votre part nette d’héritage ? De quels frais devez-vous vous acquitter ? Ces questions se posent au décès d’un proche lorsque le moment est venu d’ouvrir le dossier des droits de succession.
Pour établir vos frais de successions, vous devez déterminer plusieurs montants :
- L’actif net taxable, soit l’actif brut auquel vous devez dĂ©duire le passif, c’est-Ă -dire les possibles dettes du dĂ©funt si elles n’ont pas Ă©tĂ© absorbĂ©es. L’actif brut va ĂŞtre calculĂ© en estimant la valeur des biens
- L’actif successoral taxable qui correspond à votre propre part, calculé à partir de l’actif net taxable
- Votre abattement, soit la réduction que vous pouvez légalement appliquer. Ce dernier est établi en fonction du lien de parenté avec le défunt et de chaque situation personnelle. Il s’élève à 100 000 € pour un enfant, un père ou une mère, 15 932 € pour un frère ou une sœur, 7 967 € pour un neveu ou une nièce, 1 594 € si aucun autre abattement n’est applicable. Les personnes en situation de handicap bénéficient d’un abattement supplémentaire de 159 325 €
- Votre part taxable correspond à votre actif successoral taxable duquel vous déduisez votre abattement
Les barèmes de taxation sont ensuite fixés selon la nature du lien de parenté et le montant de la part taxable : le détail en ligne sur cette page.
Vous venez de perdre un proche et l’héritage est un sujet qui vous taraude ? Pour avoir une estimation de vos droits de succession, vous pouvez vous rendre sur le site du Service public. La simulation en ligne s’effectue en saisissant la valeur des biens composant la succession, le montant de votre part d’héritage et le montant des éventuelles dettes du défunt. Attention, la somme estimée ne prend pas en compte les frais de notaire.
Quelles conditions d’exonération des droits de succession ?
Dans quelles situations pouvez-vous bénéficier d’une exonération des droits de succession ?
- En cas de mariage et de PACS
- Pour les enfants, si l’actif net successoral est inférieur à 50 000 €. Idem en cas de dons manuels ou de donations déclarés ou enregistrés.
- Si l’actif net successoral est inférieur à 3 000 €, quel que soit le lien de filiation
- Si vous êtes héritiers de victimes de guerre, d’acte de terrorisme, de militaires**, de professionnels décédant dans le cadre de leurs missions (sapeurs-pompiers, police, gendarme, agent de douane)
- En cas de biens lĂ©guĂ©s aux associations ou fondations reconnues d’utilitĂ© publique, impliquĂ©es dans l’assistance, la bienfaisance, la protection de l’environnement, la protection des animaux, le culturel
- En cas de biens légués à l’Etat ou à un organisme de Service public
Les exonérations des droits de succession vont en grande partie dépendre du lien de parenté avec le défunt et de la nature des bien transmis

Les exonérations totales
Ces dernières concernent plus précisément trois catégories :
- la réversion de rente viagère entre parents de ligne directe
- les monuments historiques
- les rentes et indemnités versées ou dues au défunt en lien avec des réparations de dommages corporels liés à un accident ou une maladie
Depuis la loi de finances de 2025, toute rĂ©cente donc, les droits de mutation**, c’est-Ă -dire les frais de notaire, sont exonĂ©rĂ©s dans le cadre de dons versĂ©s pour l’achat d’une rĂ©sidence principale. Autre point : pour les sommes versĂ©es entre le 15 fĂ©vrier 2025 et le 31 dĂ©cembre 2026, les dons d’argent versĂ©s Ă des membres de la famille (enfants, petits-enfants, arrières petits-enfants, Ă dĂ©faut une nièce ou un neveu) sont Ă©galement exonĂ©rĂ©s des droits de mutation dès lors que ces sommes sont destinĂ©es Ă acheter, construire une rĂ©sidence principale. La rĂ©novation Ă©nergĂ©tique de cette rĂ©sidence est aussi concernĂ©e par cette exonĂ©ration. Quel critère d’Ă©ligibilitĂ© pour bĂ©nĂ©ficier de cette exonĂ©ration ? La somme doit ĂŞtre investie dans les 6 mois suivant le dĂ©cès du proche. Et quel en est le plafond ? 100 000 € par donateur et 300 000 € par bĂ©nĂ©ficiaire. Enfin, la nouvelle rĂ©sidence ne doit pas ĂŞtre revendue dans les cinq ans.
*Maître Ronit Antebi est également spécialisée en droit de la famille, droit pénal, droit des mineurs, droit des hospitalisations sans consentement, droit des animaux
**lorsque le décès survient dans le cadre d’opérations extérieures
***aussi appelés “frais de mutation” et plus communément “frais de notaire”, les droits de mutation correspondent aux taxes perçus par l’Etat, dans le cadre de transactions immobilières, lorsqu’un bien est acquis par un autre propriétaire (vente, location, donation, héritage ou autre forme de transmission…)
Crédit photo
Gautierbzh/AdobeStock.com
Sources
- Service public. Règles en matière d’hĂ©ritage : dĂ©funt ayant eu des enfants. ConsultĂ© en fĂ©vrier 2025. En ligne : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F1270#:~:text=D%C3%A9funt%20non%20mari%C3%A9,ses%20biens%20%C3%A0%20parts%20%C3%A9gales.&text=Si%20le%20d%C3%A9funt%20vivait%20en,aucun%20droit%20sur%20sa%20succession.
- Ministère de l’Ă©conomie des finances et de la souverainetĂ© industrielle et numĂ©rique. Droits de succession : que devez-vous payer sur votre part ? ConsultĂ© en fĂ©vrier 2025. En ligne : https://www.economie.gouv.fr/particuliers/droits-succession-simulateur#Exo_temporaire
- Interview de Me , avocate spécialisée