À l’occasion de la Toussaint Paulo-Jorge Pinheiro, directeur de l’agence Sublimatorium Florian Leclerc à Montargis, évoque son parcours de vie dans le journal La République du Centre.

La barbe soigneusement taillée, la poignée de main chaleureuse, Paulo Jorge Pinheiro accueille ses clients avec bonhomie entre les urnes et les plaques funéraires. Il a ouvert sa boutique de pompes funèbres il y a un an dans la rue Jaurès à Montargis. Une franchise de la société Florian Leclerc.

« MONTARGIS M’A CHOISI »

Le fringant directeur de l’établissement vient de fêter ses cinquante ans et une reconversion réussie. Né en région parisienne , Paulo Jorge exerce d’abord en tant que coordinateur dans une société multimarques. Pendant une vingtaine d’années, il réalise les trajets entre le Montargois et Marne-la-Vallée. « Je pilotais les équipes, j’avais déjà cette capacité dans le relationnel ». Mais le travail sept jours sur sept l’épuise. Il veut passer davantage de temps avec sa famille.

En 2017, il se reconvertit dans les pompes funèbres. La belle famille baigne déjà dans le métier. Il passe alors le diplôme de conseiller funéraire, un savant mélange de psychologie et de droit puis un diplôme de responsable d’agence. Paulo Jorge Pinheiro confesse quelques difficultés à reprendre les bancs de l’école mais compte bien entretenir sa fibre entrepreneuriale.

C’est aussi l’occasion pour le conseiller funéraire en herbe d’espérer un nouveau départ en province. Direction Bayonne ou Paulo Jorge s’installe à son compte en janvier 2020. Deux mois plus tard, l’entreprise est rattrapée par le Covid. Cependant, le projet professionnel de Paulo Jorge Pinheiro ne restera pas lettre morte. « C’est Montargis qui m’a choisi et pas l’inverse », clame le directeur d’agence, qui revient dans le Loiret, à proximité de ses quatre enfants.

Dans sa boutique, une pièce à peine dissimulée où sont présentés quatre cercueils. « Ça ne me fait plus rien maintenant. Pour moi c’est comme des meubles, dit-il en toquant sur un cercueil. Tant que ça ne répond pas c’est bon ! »

Loin des clichés du croquemort livide et blasé à la Lucky Luke, il pétille d’humour et de vie derrière son bureau. « Je suis un agent du dernier voyage. C ’est un métier où l’on n’est souvent associé à la mort, alors qu’en fait c’est le contraire. Les morts je ne peux plus rien faire pour eux.

Mon métier c’est d’accompagner ceux qui restent, les vivants », philosophe Paulo Jorge.

LE « CONFESSIONNAL »

Ce grand bavard est passionné par son métier, de la poignée du cercueil à l’Ave Maria qu’il diffuse dans la chambre mortuaire. « Ce métier ne me fait pas réfléchir à la mort mais plutôt à la vie et au fait qu’il faut profiter de chaque instant pour aimer, pardonner ».

« Ce qui est dit à Dallas reste à Dallas », enchaîne alors le quinquagénaire dont le bureau, le « confessionnal », regorge d’histoires poignantes. « On sait capter quand une personne est en état de choc ou encolère », comme cet homme qui venait de perdre sa mère et que le conseiller funéraire a écouté patiemment. « On essaye de se blinder mais ça ne m’empêche pas d’avoir une petite larme, parfois ».
Comme cet homme de 20 ans qui enterre sa mère et regrette qu’elle ne connaîtra pas les futures étapes de sa vie.

« C’est un métier qui fait relativiser. Beaucoup de choses sont moins graves que le fait de mourir », estime Paulo Jorge Pinheiro qui confesse être encore « remué » par la froideur des corps et les parents qui enterrent leurs enfants.

Mais il a un exutoire pour ça, la boxe, deux heures par semaine. « C’est ma bulle d’air, ça me déstresse » . À son poignet , l’homme porte un petit bracelet où l’on peut inscrire l’empreinte d’un défunt. « Mais ça marche aussi pour les naissances », sourit Paulo Jorge Pinheiro. 

Article de La République du Centre de Cécile Kettanjian, mardi 1ier novembre 2022