En cas de dĂ©cĂšs de l’un de vos proches, quelles situations vous obligent Ă  prendre rendez-vous chez un notaire ? PĂšre, mĂšre, enfant, fratrie, famille lointaine : quelles rĂšgles s’appliquent ensuite pour calculer votre part d’hĂ©ritage ? Incipio vous rĂ©pond grĂące Ă  l’expertise de Me Ronit Antebi, avocate Ă  Cannes spĂ©cialisĂ©e en droit de la famille et des successions.

Les questions d’hĂ©ritage nous semblent toujours lointaines. Au mieux, nous en parlons en petit comitĂ© entre deux portes sans forcĂ©ment inclure dans la discussion toutes les personnes concernĂ©es. Au pire le sujet est Ă©vitĂ©, mis de cĂŽtĂ©. “Le testament ? On verra plus tard”. “Qui rĂ©cupĂ©rera la maison ? Silence chronique Ă  ce sujet
”

Pour autant nous serons toutes et tous concernĂ©s un jour par ce partage des biens liĂ©s au dĂ©cĂšs de nos proches. Quelles sont alors les rĂšgles en vigueur en matiĂšre d’hĂ©ritage ? Me Ronit Antebi, avocate Ă  Cannes spĂ©cialisĂ©e en droit de la famille et des successions nous livre son expertise.

Rendez-vous chez le notaire

Dans un premier temps, il faut “rĂ©cupĂ©rer l’acte de dĂ©cĂšs, les Ă©lĂ©ments de l’état civil et aller chez le notaire pour lui confier la succession, mĂȘme si bien sĂ»r toutes les successions ne valent pas le coup d’aller chez le notaire, confirme Me Antebi. Pour justifier les formalitĂ©s Ă  effectuer, il faut en effet qu’elles reprĂ©sentent une certaine valeur, soit 50 000 euros ou un bien immobilier dans la succession”. Dans ce cas, le notaire va “procĂ©der Ă  la recherche des hĂ©ritiers, poser des questions Ă  l’hĂ©ritier qui se prĂ©sente, interroger le fichier des derniĂšres volontĂ©s du dĂ©funt, regarder si un testament est enregistrĂ© au registre national. Il va Ă©galement pouvoir interroger les banques pour informer du dĂ©cĂšs, clĂŽre les comptes pour que la banque puisse transfĂ©rer les fonds au notaire”. 

L’acte de notoriĂ©tĂ© “est ensuite prĂ©parĂ© pour donner la qualitĂ© d’hĂ©ritiers. Ce document est important notamment en cas d’investigation, de procĂ©dures entre les hĂ©ritiers nĂ©cessitant l’accĂšs aux bilans mĂ©dicaux, aux relevĂ©s de bancaire, au relevĂ© de carriĂšre par exemple. Sans acte de notoriĂ©tĂ©, l’administration ne peut fournir toutes ces preuves”, poursuit Me Antebi. 

Le notaire fournit ensuite “les attestations immobiliĂšres, la dĂ©claration de succession dĂ©diĂ©e aux impĂŽts sachant qu’il faut rĂ©agir dans un dĂ©lai de moins de 6 mois”. Que se passe-t-il si ce dĂ©lai est dĂ©passĂ© ? “Des pĂ©nalitĂ©s de retard voire des majorations de 40% peuvent ĂȘtre mises en place. D’oĂč l’intĂ©rĂȘt de faire les choses au plus vite.” Reste que parfois, des conflits viennent perturber cette organisation, “avec des hĂ©ritiers qui ne sont pas d’accord entre eux. 

Enfants, époux, PACS et testament

 â€œContrairement aux Etats-Unis oĂč tout l’hĂ©ritage est attribuĂ© selon la volontĂ© du dĂ©funt, en France, il existe des rĂšgles qui visent Ă  protĂ©ger la conservation des biens dans une famille en priorisant les enfants”. 

Ainsi, si le dĂ©funt avait des enfants, mais qu’aucun testament n’avait Ă©tĂ© rĂ©digĂ© de son vivant, tous ses biens vont Ă  ses descendants (enfants, petits-enfants, arriĂšres petits-enfants) et son Ă©poux/Ă©pouse s’il/elle Ă©tait mariĂ©(e). Le testament, s’il existe, doit indiquer que le dĂ©funt rĂ©serve une partie de son patrimoine  Ă  ces mĂȘmes descendants. 

La succession doit ĂȘtre rĂ©partie Ă  parts Ă©gales entre chaque enfant du dĂ©funt, et ce mĂȘme si les enfants ne sont pas nĂ©s de la mĂȘme mĂšre. Cette somme sera divisĂ©e une fois la part attribuĂ©e Ă  l’épouse actuelle. “Dans tous les cas, s’il est possible de dĂ©shĂ©riter son conjoint dans une certaine mesure, par testament authentique, il est impossible, illĂ©gale de dĂ©shĂ©riter son enfant”, affirme Me Antebi.

 â€œContrairement aux Etats-Unis oĂč tout l’hĂ©ritage est attribuĂ© selon la volontĂ© du dĂ©funt, en France, il existe des rĂšgles qui visent Ă  protĂ©ger la conservation des biens dans une famille en priorisant les enfants”, Me Antebi

L’hĂ©ritage par reprĂ©sentation du parent

Et dans quel cadre un petit-enfant va-t-il hĂ©ritĂ© de son grand-pĂšre ou de sa grand-mĂšre ? 

  • Lorsque son parent est dĂ©cĂ©dĂ©
  • Lorsque son parent renonce Ă  la succession de son propre parent dĂ©funt
  • Lorsque le parent est considĂ©rĂ© comme “indigne de succĂ©der”, en clair lorsqu’une faute grave a Ă©tĂ© commise Ă  l’encontre du dĂ©funt. Rendez-vous sur cette page pour obtenir toutes les informations Ă  ce sujet.

Concernant l’union maritale

L’époux du dĂ©funt hĂ©rite systĂ©matiquement. A noter que la part successoral va varier en fonction du rĂ©gime matrimonial : communautĂ© rĂ©duite aux acquĂȘts ou contrat de mariage. Cette part est aussi fixĂ©e en fonction du nombre d’enfants dans la couple. 

Que dit le droit Ă  ce sujet ? 

  • Si le couple a un enfant, la moitiĂ© des biens va Ă  cet enfant
  • Si le couple a deux enfants, les deux-tiers des biens reviennent aux deux enfants
  • Si le couple a trois enfants ou plus, les trois-quarts des biens sont distribuĂ©s aux trois enfants et plus

Le reste, appelĂ©e la quotitĂ© disponible, peut ĂȘtre donnĂ©e librement par donation ou testament.

A noter : aucun droit de succession n’existe pour les concubins et les personnes pacsĂ©es, sauf si bien sĂ»r ces derniĂšres figurent dans le testament pour disposer de tout ou partie de cette quotitĂ© disponible. 

Votre part nette d’hĂ©ritage

Passons maintenant Ă  la partie calcul. Comment Ă©valuer prĂ©cisĂ©ment votre part nette d’hĂ©ritage ? De quels frais devez-vous vous acquitter ? Ces questions se posent au dĂ©cĂšs d’un proche lorsque le moment est venu d’ouvrir le dossier des droits de succession. 

Pour établir vos frais de successions, vous devez déterminer plusieurs montants :

  • L’actif net taxable, soit l’actif brut auquel vous devez dĂ©duire le passif, c’est-Ă -dire les possibles dettes du dĂ©funt si elles n’ont pas Ă©tĂ© absorbĂ©es. L’actif brut va ĂȘtre calculĂ© en estimant la valeur des biens
  • L’actif successoral taxable qui correspond Ă  votre propre part, calculĂ© Ă  partir de l’actif net taxable
  • Votre abattement, soit la rĂ©duction que vous pouvez lĂ©galement appliquer. Ce dernier est Ă©tabli en fonction du lien de parentĂ© avec le dĂ©funt et de chaque situation personnelle. Il s’élĂšve Ă  100 000 € pour un enfant, un pĂšre ou une mĂšre, 15 932 € pour un frĂšre ou une sƓur, 7 967 € pour un neveu ou une niĂšce, 1 594 € si aucun autre abattement n’est applicable. Les personnes en situation de handicap bĂ©nĂ©ficient d’un abattement supplĂ©mentaire de 159 325 €
  • Votre part taxable correspond Ă  votre actif successoral taxable duquel vous dĂ©duisez votre abattement

Les barÚmes de taxation sont ensuite fixés selon la nature du lien de parenté et le montant de la part taxable : le détail en ligne sur cette page.

Vous venez de perdre un proche et l’hĂ©ritage est un sujet qui vous taraude ? Pour avoir une estimation de vos droits de succession, vous pouvez vous rendre sur le site du Service public.  La simulation en ligne s’effectue en saisissant la valeur des biens composant la succession, le montant de votre part d’hĂ©ritage et le montant des Ă©ventuelles dettes du dĂ©funt. Attention, la somme estimĂ©e ne prend pas en compte les frais de notaire.

Quelles conditions d’exonĂ©ration des droits de succession ? 

Dans quelles situations pouvez-vous bĂ©nĂ©ficier d’une exonĂ©ration des droits de succession ? 

  • En cas de mariage et de PACS 
  • Pour les enfants, si l’actif net successoral est infĂ©rieur Ă  50 000 €. Idem en cas de dons manuels ou de donations dĂ©clarĂ©s ou enregistrĂ©s.
  • Si l’actif net successoral est infĂ©rieur Ă  3 000 €, quel que soit le lien de filiation
  • Si vous ĂȘtes hĂ©ritiers de victimes de guerre, d’acte de terrorisme, de militaires**, de professionnels dĂ©cĂ©dant dans le cadre de leurs missions (sapeurs-pompiers, police, gendarme, agent de douane)
  • En cas de biens lĂ©guĂ©s aux associations ou fondations reconnues d’utilitĂ© publique, impliquĂ©es dans l’assistance, la bienfaisance, la protection de l’environnement, la protection des animaux, le culturel
  • En cas de biens lĂ©guĂ©s Ă  l’Etat ou Ă  un organisme de Service public 

Les exonérations des droits de succession vont en grande partie dépendre du lien de parenté avec le défunt et de la nature des bien transmis

Les exonérations totales

Ces derniĂšres concernent plus prĂ©cisĂ©ment trois catĂ©gories : 

  • la rĂ©version de rente viagĂšre entre parents de ligne directe
  • les monuments historiques
  • les rentes et indemnitĂ©s versĂ©es ou dues au dĂ©funt en lien avec des rĂ©parations de dommages corporels liĂ©s Ă  un accident ou une maladie

Depuis la loi de finances de 2025, toute rĂ©cente donc, les droits de mutation**, c’est-Ă -dire les frais de notaire, sont exonĂ©rĂ©s dans le cadre de dons versĂ©s pour l’achat d’une rĂ©sidence principale. Autre point : pour les sommes versĂ©es entre le 15 fĂ©vrier 2025 et le 31 dĂ©cembre 2026, les dons d’argent versĂ©s Ă  des membres de la famille (enfants, petits-enfants, arriĂšres petits-enfants, Ă  dĂ©faut une niĂšce ou un neveu) sont Ă©galement exonĂ©rĂ©s des droits de mutation dĂšs lors que ces sommes sont destinĂ©es Ă  acheter, construire une rĂ©sidence principale. La rĂ©novation Ă©nergĂ©tique de cette rĂ©sidence est aussi concernĂ©e par cette exonĂ©ration. Quel critĂšre d’Ă©ligibilitĂ© pour bĂ©nĂ©ficier de cette exonĂ©ration ? La somme doit ĂȘtre investie dans les 6 mois suivant le dĂ©cĂšs du proche. Et quel en est le plafond ? 100 000 € par donateur et 300 000 € par bĂ©nĂ©ficiaire. Enfin, la nouvelle rĂ©sidence ne doit pas ĂȘtre revendue dans les cinq ans. 

*Maßtre Ronit Antebi est également spécialisée en droit de la famille, droit pénal, droit des mineurs, droit des hospitalisations sans consentement, droit des animaux

**lorsque le dĂ©cĂšs survient dans le cadre d’opĂ©rations extĂ©rieures

***aussi appelĂ©s “frais de mutation” et plus communĂ©ment “frais de notaire”, les droits de mutation correspondent aux taxes perçus par l’Etat, dans le cadre de transactions immobiliĂšres, lorsqu’un bien est acquis par un autre propriĂ©taire (vente, location, donation, hĂ©ritage ou autre forme de transmission
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Sources


Depuis 2018, la loi “Sueur II” interdit la conservation des cendres Ă  domicile. De quels droits disposent alors les proches du dĂ©funt quant au devenir des cendres aprĂšs une crĂ©mation ? Les prĂ©cisions de Me Philippe Nugue, avocat spĂ©cialisĂ© dans le secteur funĂ©raire au sein du cabinet Adaltys.

“Pour comprendre la lĂ©gislation relativement rĂ©cente sur la propriĂ©tĂ© des cendres, il faut resituer un peu le contexte. Ainsi, dans l’article 16-1-1 du Code civil, créé en 2008, il est Ă©crit que “le respect dĂ» au corps humain ne cesse pas avec la mort.” Et que “les restes des personnes dĂ©cĂ©dĂ©es, y compris les cendres de celles dont le corps a donnĂ© lieu Ă  crĂ©mation, doivent ĂȘtre traitĂ©s avec respect, dignitĂ© et dĂ©cence.”

Comment se traduisent ces notions de respect, de dignitĂ© et de dĂ©cence ? Dans les faits, le corps humain ne peut pas faire, en France, l’objet d’un commerce. En l’occurrence, “il a fallu de longues dĂ©cisions de justice liĂ©es Ă  des conflits familiaux avant d’avoir un rĂ©gime fixĂ© en ce sens par des textes, rĂ©sume Me Philippe Nugue. Ces conflits familiaux portaient prĂ©cisĂ©ment sur cette question du devenir de la dĂ©pouille, jusqu’ici associĂ©e Ă  un souvenir de famille”, une fois les cendres recueillies aprĂšs la crĂ©mation.

Quel devenir pour les cendres ?

Dans les faits, aprĂšs un dĂ©cĂšs, une fois la crĂ©mation effectuĂ©e, les cendres du dĂ©funt “sont recueillies dans une urne munie d’une plaque indiquant l’identitĂ© du dĂ©funt et le nom du crĂ©matorium”, rappelle le site du Service public. 

“Dans certains cas, les dĂ©funts ont fait part de leurs volontĂ©s de leur vivant concernant le devenir de leurs cendres, prolonge Mr Nugue. Dans d’autres situations, et c’est la majoritĂ© des cas, “les gens n’ont pas exprimĂ© leur derniĂšre volontĂ©. Aucune dĂ©cision n’a donc Ă©tĂ© prise en amont du dĂ©cĂšs et la recherche d’indices de ce qu’aurait Ă©tĂ© le choix revient alors aux proches”. Quelle parole va-t-elle ĂȘtre entendue ? Il va s’agir de “la personne la plus proche du dĂ©funt, celle qui entretenait un lien privilĂ©giĂ© avec le dĂ©funt, et qui pourra ĂȘtre celle en charge des funĂ©railles, prĂ©cise Me Nugue. C’est la qualitĂ© de la relation qui va ĂȘtre prise en compte, sans forcĂ©ment qu’il y ait de hiĂ©rarchie entre les liens biologiques, sentimentaux, amicaux”.

“Les cendres bĂ©nĂ©ficient d’un statut juridique, au mĂȘme titre que l’est un corps humain et ne peuvent donc ĂȘtre conservĂ©s Ă  domicile”, Me Philippe Nugue, avocat au sein du cabinet Adaltys

Mais alors peut-on, actuellement, conserver l’urne des cendres au-dessus de la cheminĂ©e ou sur l’étagĂšre Ă  souvenirs ? La rĂ©ponse est non, comme le prĂ©voit la loi “Sueur II” depuis 2018, du nom du Jean-Pierre Sueur, alors sĂ©nateur PS du Loiret, Ă  l’origine de la proposition de loi. Depuis cette date, les cendres funĂ©raires bĂ©nĂ©ficient en effet d’un statut juridique, au mĂȘme titre que l’est un corps humain et ne peuvent donc ĂȘtre conservĂ©s Ă  domicile. Pas plus qu’elles ne peuvent ĂȘtre sĂ©parĂ©es et rĂ©parties en diffĂ©rents endroits.  En termes lĂ©gislatifs, “on prĂ©cise bien que le corps ne rentre pas dans les rĂšgles habituelles du partage : le corps ne rentre pas dans le partage de l’hĂ©ritage”.

La conservation de l’urne funĂ©raire Ă  domicile reste tolĂ©rĂ©e dans une seule situation : le temps que l’organisation se mette en place concernant la destination finale des cendres.

“Pouvons-nous garder les cendres d’un dĂ©funt chez nous”? : la rĂ©ponse en VIDÉO par le Service Public

Conflits et procédures

Et si cette loi n’est pas respectĂ©e ? Alors “le juge peut prescrire toute mesure pour empĂȘcher une atteinte illicite aux cendres, en application de l’article 16-2 du Code civil”, souligne Mr Nugue. En clair, le juge pourrait fixer la destination finale des cendres. Quelle procĂ©dure peut par ailleurs ĂȘtre enclenchĂ©e en cas de dĂ©saccord entre les membres d’une mĂȘme famille ou groupe d’amis concernant le devenir des centres ? “Les proches peuvent demander des dommages et intĂ©rĂȘts sous le motif d’avoir subi un prĂ©judice moral, sachant que le devenir des cendres est le point qui prĂȘte le plus Ă  discussion, la plupart du temps dans des familles qui vivent Ă©loignĂ©es et qui revendiquent souvent que les cendres soient au plus prĂšs de chez l’un ou l’autre pour pouvoir se recueillir le plus rĂ©guliĂšrement possible.” Dans ce cas, “le juge va prendre en compte la situation des proches, c’est Ă  dire souvent la famille : s’il y a plus de famille Ă  tel endroit, la nature des liens, les modes de dĂ©placement possibles pour se recueillir etc.”.

Dispersion des cendres, inhumation ou scellage de l’urne

Selon l’article 16 de cette mĂȘme loi, il existe d’autres possibilitĂ©s concernant le devenir des cendres funĂ©raires, la dispersion Ă©tant la plus connue. Mais dans quel cadre lĂ©gal s’applique-t-elle ?

La rĂ©partition des cendres funĂ©raires peut se faire uniquement “dans des espaces  naturels non amĂ©nagĂ©s”

Les cendres funĂ©raires peuvent ĂȘtre dispersĂ©es “en pleine nature et en totalitĂ©â€, dĂ©crit Mr Nugue. Selon la circulaire de 2009, la rĂ©partition peut se faire uniquement “dans des espaces  naturels non amĂ©nagĂ©s”, en forĂȘt, dans un champ, dans un lac, tant qu’aucune habitation ne se situe aux alentours, ou encore en pleine mer (y compris l’immersion des urnes en matiĂšre biodĂ©gradable) en prenant soin de disperser les cendres Ă  300 mĂštres au minimum du rivage. 

Dans tous les cas, la mairie de la commune de naissance du dĂ©funt doit ĂȘtre informĂ©e de ce lieu de dispersion. A noter que certaines communes s’opposent Ă  la dispersion dans des cours d’eau en particulier : dans ce cas, mieux vaut se renseigner auprĂšs de la mairie. Autre point important Ă  retenir : la dispersion reste interdite dans tous les lieux publics :  stade, terrain de jeux, square, jardin public
 Et en cas de dispersion Ă  l’étranger, c’est la rĂ©glementation du pays de destination qui s’applique. 

Il est également possible de disperser les cendres :

  • Dans le jardin souvenir du cimetiĂšre ou Ă  proximitĂ© du crĂ©matorium dont dispose chaque commune française de plus de 2 000 habitants*
  • Sur le terrain communal du cimetiĂšre et ce de façon gratuite
  • Sur une propriĂ©tĂ© privĂ©e (champ, prairie, forĂȘt sauf jardin) Ă  condition de respecter des rĂšgles trĂšs strictes. La servitude du lieu doit en effet ĂȘtre perpĂ©tuelle : autrement dit le lieu doit pouvoir ĂȘtre accessible Ă  vie Ă  la famille et aux proches, mĂȘme en cas de vente du bien. Ce qui suppose bien sĂ»r l’accord du propriĂ©taire, et de possibles contraintes Ă  la revente du bien. En somme, il est illĂ©gal “de disperser les cendres dans une propriĂ©tĂ© privĂ©e”, hors zone urbaine. En revanche, “l’inhumation de l’urne dans une propriĂ©tĂ© privĂ©e est possible sous autorisation prĂ©fectorale”. Les pompes funĂšbres peuvent se charger de ces formalitĂ©s
  • L’urne peut aussi ĂȘtre inhumĂ©e dans une case de columbarium, dans une cavurne ou dans un caveau ou scellĂ©e sur une sĂ©pulture

La conservation temporaire des cendres est possible

Et si aucune dĂ©cision n’a Ă©tĂ© prise concernant le devenir des cendres ? Toujours selon la loi Sueur II, “dans l’attente d’une dĂ©cision relative Ă  la destination des cendres, l’urne cinĂ©raire est conservĂ©e au crĂ©matorium pendant une pĂ©riode qui ne peut excĂ©der un an”. Pendant ces 12 mois, cette mĂȘme urne peut Ă©galement ĂȘtre conservĂ©e “dans un lieu de culte, aprĂšs accord de l’association chargĂ©e de l’exercice du culte”.

Une fois passĂ© ce dĂ©lai d’un an, si aucune dĂ©cision finale n’a Ă©tĂ© prise, “les cendres sont dispersĂ©es dans l’espace amĂ©nagĂ© Ă  cet effet du cimetiĂšre de la commune du lieu du dĂ©cĂšs ou dans le site cinĂ©raire le plus proche.”

Transport de l’urne : que dit la loi Sueur II ?

Concernant le transport de l’urne sur le territoire français, il est possible de se dĂ©placer librement avec, sans prĂ©caution particuliĂšre. En revanche, si le transport s’effectue Ă  l’étranger, l’obtention d’un laissez-passer auprĂšs de la prĂ©fecture est obligatoire. Idem concernant les documents demandĂ©s par le pays de destination. Dans ce cas, l’urne sera systĂ©matiquement scellĂ©e.

*dans ce cas, la mairie de la commune de naissance du dĂ©funt doit Ă©galement en ĂȘtre informĂ©e

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La mort et les deuils n’ont malheureusement pas de frontiĂšre. Il arrive en effet que des dĂ©cĂšs surviennent Ă  l’étranger et qu’il faille rapatrier le corps du dĂ©funt en France. Une Ă©tape indispensable pour procĂ©der aux rituels de la veillĂ©e mortuaire, de la cĂ©rĂ©monie d’inhumation ou de crĂ©mation pour prendre le chemin du deuil. Quelles sont les dĂ©marches Ă  effectuer ? Les rĂ©ponses de Dominic Vernhes, prĂ©sident directeur gĂ©nĂ©ral d’Anubis.

La gestion d’un rapatriement d’un corps suite Ă  un dĂ©cĂšs survenu Ă  l’étranger fait partie des imprĂ©vus de la vie pas toujours Ă©vident Ă  gĂ©rer. Pour ne pas ĂȘtre trop dĂ©boussolĂ©(e) le moment venu, mieux vaut ĂȘtre informĂ©(e) des dĂ©marches Ă  effectuer.  

PremiĂšre Ă©tape en cas de dĂ©cĂšs survenu Ă  l’étranger : “il faut se rapprocher en premier lieu de l’autoritĂ© consulaire reprĂ©sentant le pays du ressortissant dĂ©cĂ©dĂ©â€, prĂ©cise Dominic Vernhes, prĂ©sident directeur gĂ©nĂ©ral d’Anubis*, entreprise spĂ©cialisĂ©e en assistance funĂ©raire internationale. Selon les cas, une entreprise comme Anubis, l’entreprise de pompes funĂšbres ou la personne la plus proche du dĂ©funt, va organiser les dĂ©marches pour rapatrier le corps en France. 
Le Service public propose aussi une liste d’interlocuteurs disponibles pour vous accompagner dans ces Ă©tapes, alors que le choc de l’annonce du dĂ©cĂšs et est Ă  l’Ɠuvre.

Mise en biÚre et transport de la dépouille

Quelles sont ensuite les diffĂ©rentes Ă©tapes d’un rapatriement du corps Ă  l’étranger ? Tout d’abord le choix du mode de transport. Entre la voie terrestre, aĂ©rienne ou ferroviaire, “nous optons pour celui qui prĂ©sente le moins de rupture, donc le plus direct dans le respect du proche dĂ©cĂ©dĂ©, le plus fiable, atteste Dominic Vernhes. Autres critĂšres pris en compte : “le coĂ»t, incluant les accompagnateurs s’il y en a”. 

De son cĂŽtĂ©, la prĂ©fecture oĂč la mise en biĂšre a eu lieu dĂ©livre un document Ă©crit certifiant l’autorisation de transport de la dĂ©pouille. D’autres papiers doivent Ă©galement ĂȘtre fournis : la piĂšce d’identitĂ© du dĂ©funt, son acte de naissance et son acte de dĂ©cĂšs, l’autorisation d’inhumation, l’autorisation du prĂ©fet ou du consulat.

Dans tous les cas, “dĂšs l’instant oĂč cela rĂ©pond Ă  une expression des volontĂ©s ou d’un choix des proches, le transport des cendres est possible”, confirme Dominic Vernhes, pdg d’Anubis

Cercueil, caisson en métal et soins de conservation

Qu’il soit effectuĂ© par la voie terrestre ou aĂ©rienne, le transport est trĂšs rĂ©glementĂ© :

  • – “Le corps est placĂ© et calĂ© dans le cercueil dont le modĂšle de base dĂ©pendra du pays de survenance du dĂ©cĂšs”, prĂ©cise Dominic Vernhes
  • – Le cercueil doit obligatoirement ĂȘtre muni d’un caisson en mĂ©tal pour assurer un hermĂ©tisme total
  • – Chaque compagnie aĂ©rienne dispose de ses propres contraintes lĂ©gales. Certaines d’entre elles imposent que les soins de conservation aient Ă©tĂ© effectuĂ©s avant la mise en biĂšre. D’autres exigent que le cercueil soit encastrĂ© dans une caisse de bois
  • – Lorsque les soins de conservation sont rĂ©alisĂ©s dans le pays Ă©tranger dans lequel le dĂ©cĂšs est survenu, l’équipe mĂ©dicale remet une attestation qui devra ĂȘtre prĂ©sentĂ©e aux autoritĂ©s et Ă  la compagnie aĂ©rienne 

Dans les jours suivant le dĂ©cĂšs, les dĂ©marches pour transporter une dĂ©pouille dans un cercueil peuvent ĂȘtre vĂ©cues comme trĂšs contraignantes par certaines familles. Il arrive donc que la crĂ©mation soit rĂ©alisĂ©e sur le lieu de dĂ©cĂšs avant de transporter l’urne en France. Des contraintes sont certes imposĂ©es pour cet acheminement des cendres, mais ces derniĂšres sont en rĂšgle gĂ©nĂ©rale plus simples Ă  gĂ©rer. Dans tous les cas, “dĂšs l’instant oĂč cela rĂ©pond Ă  une expression des volontĂ©s ou d’un choix des proches, le transport des cendres est possible”, confirme Dominic Vernhes.
Et sous combien de temps le rapatriement du corps est-il effectuĂ© ? Ce dĂ©lai est “trĂšs variable de quelques jours Ă  quelques semaines, relaie Dominic Vernhes. Cela dĂ©pend de beaucoup de paramĂštres, de la cause de dĂ©cĂšs, du lieu, de la personne dĂ©cĂ©dĂ©e sans parent sur place, de la question de la desserte rĂ©guliĂšre ou non de la destination de retour, de la prise en charge financiĂšre, de l’absence de conflit familial
”. “Le critĂšre religieux” peut aussi entrer en ligne de compte. En fonction des pratiques (catholique, musulmane, juive, hindouiste, bouddhiste), les rites d’inhumation ou de crĂ©mation peuvent en effet diffĂ©rer en fonction de la toilette mortuaire.

Coût et assurances des frais de transport

Comme le prĂ©cise Dominic Vernhes, “un rapatriement de corps reprĂ©sente une charge financiĂšre trĂšs variable selon le pays” dans lequel le dĂ©cĂšs est survenu. “Sans que ce soit une obligation, il peut ĂȘtre trĂšs utile de vĂ©rifier si une prise en charge financiĂšre partielle ou totale peut ĂȘtre sollicitĂ©e auprĂšs d’un organisme d’assurance et/ou d’assistance comme par exemple un contrat liĂ© Ă  une carte bancaire**, sous rĂ©serve de disposition spĂ©cifique tel que le paiement d’un billet avec sa carte mais aussi un contrat liĂ© Ă  l’obligation d’un contrat d’assistance requise par le pays de destination pour obtenir un visa
”

Le montant de la couverture va bien sĂ»r varier selon la nature du contrat et le montant de cotisation de l’assurĂ©. Les assureurs couvrent en rĂšgle gĂ©nĂ©rale : 

  • – les frais de transport du lieu du dĂ©cĂšs (lieu public, hĂŽpital
) vers le point de dĂ©part du rapatriement (lieu de location, aĂ©roport
)
  • – les frais de transport du lieu d’arrivĂ©e en France jusqu’au lieu des obsĂšques

Les frais de la compagnie de transport peuvent ĂȘtre partiellement ou nullement couverts.

Mais de quel frais parle-t-on pour Ă©valuer le coĂ»t d’un rapatriement ? De la toilette mortuaire, des rituels sur la dĂ©pouille, de la prestation des pompes funĂšbres, du prix du cercueil, du tarif de la compagnie de transport (terrestre, aĂ©rienne, maritime). Si la voie terrestre est choisie pour le transport de la dĂ©pouille, le coĂ»t sera fixĂ© en fonction de la durĂ©e du trajet.

Des empĂȘchements au rapatriement ?

Dans quelles conditions le rapatriement peut-il ĂȘtre compliquĂ© voire empĂȘchĂ© ? 

  • – “Pendant le Covid, certains pays n’acceptaient pas les entrĂ©es de certains pays”, se rappelle Dominic Vernhes
  • – Lorsque “l’identification du corps est impossible”
  • – “En cas de coĂ»t trop Ă©levĂ©â€
  • – “En cas de conflits familiaux”
  • – “Lorsque le rapatriement survient au sein d’une zone de conflit”
  • – “Lorsqu’aucune relation diplomatique n’existe pas entre les deux pays concernĂ©s”
  • – Lorsque le ou la dĂ©funt(e) Ă©tait atteint(e) d’une maladie transmissible comme le VIH/SIDA, aucun soin de conservation ne peut ĂȘtre prodiguĂ© : dans cette situation le mĂ©decin ne pourra pas certifier la non-contagiositĂ© lors du transport. Des mesures particuliĂšres sont alors prises pour assurer le transport : le corps doit ĂȘtre enveloppĂ© dans un linceul imbibĂ© d’une solution antiseptique. La liste des maladies contagieuses concernĂ©es par cette procĂ©dure sont consultables sur cette page
  • – Lorsque aucune une contrainte lĂ©gale n’a pas Ă©tĂ© respectĂ©e
  • – Lorsque le famille proche n’a pas donnĂ© son accord Ă©crit pour le rapatriement du corps

Pour aller plus loin : rendez-vous sur cette page si vous voulez en savoir davantage sur le rapatriement d’un corps de France vers l’étranger. Cliquez sur ce lien pour connaĂźtre les procĂ©dures sur le rapatriement d’un corps sur le sol français d’une ville Ă  une autre. Toutes les informations sur le rapatriement d’un dĂ©partement d’outre-mer en mĂ©tropole sur cette page.

*Anubis est agréé agréé IATA Freight Forwarder depuis 20 ans, cas unique dans la profession

**le contrat peut aussi ĂȘtre liĂ© Ă  une assurance habitation ou Ă  une responsabilitĂ© civile

Source

  • – Interview de Dominic Vernhes, prĂ©sident directeur gĂ©nĂ©ral d’Anubis, le 28 novembre 2024

Service-public.fr. Transport d’une personne dĂ©cĂ©dĂ©e. ConsultĂ© en janvier 2025. En ligne : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F35706

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A la perte d’un proche, nombre d’entre nous sommes tentĂ©s de tenir les enfants Ă©loignĂ©s des rites funĂ©raires, de peur de les exposer Ă  la rĂ©alitĂ© trop crue qu’est la mort. A quel point est-il  important, Ă  l’inverse, de leur faire une place dans toutes les phases de la perte d’un proche ? Comment rester Ă  l’écoute de leurs propres ressentis, s’ils refusent ou insistent de voir le corps et/ou d’assister Ă  la cĂ©rĂ©monie ? Les Ă©clairages de Catherine Dolto, mĂ©decin pĂ©diatre, praticienne en haptonomie et Ă©crivaine.

Quand un proche dĂ©cĂšde, certains adultes peuvent avoir tendance Ă  ne pas convier les enfants Ă  la cĂ©rĂ©monie, encore moins Ă  la veillĂ©e mortuaire. Par peur, par rĂ©flexe, par protection. “Par reproduction de la façon dont l’adulte a Ă©tĂ© Ă©levĂ©, par transfert de l’adulte vers  l’enfant quand l’adulte a, par le passĂ©, Ă©tĂ© traumatisĂ© par quelque chose au sujet de la mort.”

Mais les enfants sont bien “plus rĂ©sistants Ă  la rĂ©alitĂ© que l’on veut bien le penser, si les choses sont amenĂ©es au bon moment, Ă  hauteur d’enfant. Ils en ont mĂȘme besoin, de la rĂ©alitĂ©, pour consolider les repĂšres de leur petit monde en construction qu’un premier deuil va souvenir venir fragiliser”

Des rituels et ĂȘtre ensemble

Ainsi, ne pas proposer Ă  un enfant de venir voir la personne dĂ©cĂ©dĂ©e, ne pas le convier Ă  la cĂ©rĂ©monie revient Ă  l’exclure d’un processus dont tous les adultes ont besoin pour accepter la mort et commencer le chemin du deuil. “Les rituels, Ă©tablis pour les vivants, sont lĂ  pour amadouer la violence de la mort de quelqu’un qui Ă©tait lĂ  mais qui n’est plus lĂ , souligne Catherine Dolto. Il en faut, et de l’ĂȘtre ensemble Ă©galement, pour humaniser cette Ă©nigme de la mort. Tous les ĂȘtres humains, Ă  tous les Ăąges de la vie, en ont besoin. Il est important de faire une place aux enfants dans ces rituels, s’ils le souhaitent.” Mais “nous sommes dans une Ă©poque de sur-protection gĂ©nĂ©rale. On Ă©carte les enfants pour qu’ils ne soient pas traumatisĂ©s. Or je pense que c’est vraiment l’inverse qui se passe”.

Avant la mise en biĂšre

Voir un mort reste quelque chose de fort, de singulier, de percutant. “AprĂšs le dĂ©cĂšs, le corps est froid, le visage n’a plus d’expression, c’est trĂšs interpellant. Cela reste visible pour beaucoup d’entre nous, dĂ©crit Catherine Dolto. Pour d’autres, un peu moins. Ainsi, il appartient Ă  chacun de vouloir voir le mort une derniĂšre fois, ou non, et ce Ă  tous les Ăąges de la vie. Pour un enfant en particulier, l’attention doit ĂȘtre portĂ©e sur leur volontĂ©, ce qu’ils expriment Ă  ce sujet.

Il est donc essentiel de lui faire une place lors de la veillĂ©e mortuaire, autant que de respecter son souhait s’il prĂ©fĂšre rester Ă©loignĂ© de tout cela, mĂȘme aprĂšs avoir reçu toutes les explications sur le fait que cette rencontre est lĂ  pour voir le corps une derniĂšre fois.

Mais comment faire, concrĂštement, pour aborder le sujet de la veillĂ©e mortuaire avec un enfant, sans le forcer Ă  quoique ce soit ? Premier pas : “laisser l’enfant mĂ»rir ses propres questions et sa position face Ă  la mort est primordial, car ça peut vraiment ĂȘtre trĂšs violent”, souligne Catherine Dolto. Dans le dĂ©tail, vous pouvez :

  • Lui expliquer qu’il a le droit de venir voir papi, mami
 une derniĂšre fois s’il en a envie, qu’il n’est pas obligĂ©, que s’il le veut vous serez lĂ  pour l’accompagner, lui tenir la main, sortir quand il en a envie.
  • S’il dit oui, lui dire simplement que le corps/le visage des morts n’est pas le mĂȘme que celui des vivants parce que l’oxygĂšne/l’air ne circule plus, que le visage ne sera peut-ĂȘtre pas de la mĂȘme couleur mais que c’est normal
  • Ne le forcez pas Ă  venir voir le mort ni Ă  l’embrasser. Au sein d’une mĂȘme fratrie ou troupe de cousins, les rĂ©actions peuvent ĂȘtre trĂšs diffĂ©rentes et il est bon de s’adapter Ă  chaque enfant
  • PrĂ©voir un adulte pour accompagner l’enfant qui pourra s’en aller si la veillĂ©e dure trop longtemps et/ou qu’il a envie de sortir 
  • Lui proposer de rentrer dans la piĂšce de recueil, mais de rester loin du corps s’il se sent plus Ă  l’aise Ă  distance

Lui expliquer “ce que l’on va faire du corps, en lui disant que l’on va s’occuper de ses restes d’une façon digne, que l’on va l’honorer par un rituel qui peut ĂȘtre religieux, laĂŻque. Le signe que nous sommes des humains”.

“Les tout-petits demandent rarement de venir voir le mort, mais si l’enfant insiste, il faut accepter tout en le prĂ©parant car ça va ĂȘtre trĂšs dĂ©routant”, Catherine Dolto

Et si votre enfant vous semble vraiment trop petit pour assister Ă  la veillĂ©e mortuaire et que vous ne savez pas comment rĂ©agir ? “Les tout-petits demandent rarement de venir voir le mort, mais si vraiment l’enfant insiste beaucoup, il faut accepter en essayant de comprendre pourquoi, tout en le prĂ©parant car ça va ĂȘtre trĂšs dĂ©routant”, souligne Catherine Dolto. 

“Je peux venir Ă  la cĂ©rĂ©monie ?”

Et sur le fait d’emmener un enfant Ă  la cĂ©rĂ©monie ? Ils doivent y “participer, c’est une Ă©vidence”. Comment, alors, aborder ce sujet ? 

  • – Lui demander s’il a envie de venir avec tout le monde “se recueillir pour honorer le souvenir de papi, mami”
 LĂ  aussi, on Ă©vitera les termes “dire au revoir Ă  papi, mami, car il ne faut pas parler de dĂ©part”, afin que l’enfant ne soit pas l’attente d’un retour de la personne. “Au revoir implique un revoir”, souligne Catherine Dolto Ă  ce sujet
  • – “Le prĂ©venir, lui expliquer le dĂ©roulĂ© de la cĂ©rĂ©monie, leur dire ce qui va se passer, quand le cercueil va entrer dans la terre ou dans le four”
  • – PrĂ©voir un adulte pour accompagner l’enfant si la cĂ©rĂ©monie est trop longue
  • – Lui demander oĂč il souhaite se placer dans la salle de cĂ©rĂ©monie ou dans l’église : s’il souhaite rester loin du cercueil ou s’il a envie de s’en approcher

Pour aller plus loin : Incipio a publié un article sur la symbolique de la mort auprÚs des petits : comment en parler, comment la représenter ? Vous pouvez le consulter en cliquant sur ce lien.

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Sources

  • – Interview de Catherine Dolto, mĂ©decin pĂ©diatre, praticienne en haptonomie et Ă©crivaine, le 13 novembre 2024


Les soins de conservation sont prodiguĂ©s auprĂšs d’une personne dĂ©cĂ©dĂ©e avant son inhumation ou sa crĂ©mation. Cette spĂ©cialitĂ©, celle du thanatopracteur, consiste Ă  ralentir le processus de dĂ©composition du corps. AssociĂ©e Ă  la toilette mortuaire, il s’agit de prendre soin, d’accompagner le dĂ©funt dans la dignitĂ©, de le rendre prĂ©sentable auprĂšs des proches venus se recueillir lors de la veillĂ©e. Pour en savoir plus, Incipio est allĂ© Ă  la rencontre de SĂ©verine Delmasse, thanatopractrice dans la rĂ©gion nantaise.

L’enveloppe d’un corps et tout ce que le mouvement, le souffle, le sourire propulsent d’énergie quand celui-ci est encore en vie. Tout cela prend encore plus d’épaisseur quand devant vos yeux se trouve la mort. Simplement. Un corps qui s’est Ă©teint, inerte Ă  tout jamais, lĂ  juste devant vous, dans tout ce qu’il y a de plus brut et d’authentique. Tic tac le temps est passĂ©, le dernier regard s’en est allĂ©.

Les mĂ©tiers de la mort sont en contact permanent avec ce pouls fini de la vie. Les professionnels des pompes funĂšbres, les spĂ©cialistes de la mĂ©decine lĂ©gale et des soins de thanatopraxie travaillent au quotidien avec cette rĂ©alitĂ© qu’est la mort, le vĂ©cu des proches, des familles. 

Une astreinte permanente

Curieux, animĂ© par l’idĂ©e de tĂ©moigner de ces mĂ©tiers essentiels, Incipio est allĂ© Ă  la rencontre de l’une d’entre elles pour aborder le sujet des soins de conservation. Embarquons pour deux heures entre quatre murs avec SĂ©verine Delmasse, thanatopractrice installĂ©e depuis un an et demi dans les Pays de la Loire. 

Il est 14h15, nous avons rendez-vous Ă  la chambre funĂ©raire de la Classerie, Ă  RezĂ© prĂšs de Nantes. Ce vendredi aprĂšs-midi d’automne est gris Ă  souhait, plutĂŽt frais mais le tempĂ©rament chaleureux de la cinquantenaire nous embarque immĂ©diatement. Voiture garĂ©e, vapote en mains, veste de cuir, carrĂ© blond foncĂ© et regard bleu profond, la rencontre avec SĂ©verine Delmasse se fait Ă  mĂȘme le parking. Et la discussion commence naturellement, sans emphase, les pieds dans le gravier. 

“Je reviens de Saint-Nazaire oĂč j’ai Ă©tĂ© m’occuper d’un soin Ă  domicile ce matin, un aller-retour de 80 kilomĂštres et cet aprĂšs-midi je suis ici, prĂ©vient celle qui enchaĂźne les semaines de travail sans compter les kilomĂštres, sans jour de pause avec des levers rĂ©guliers Ă  6h. “Les semaines sont denses. MĂȘme si je n’ai pas de soins tous les jours, il faut ĂȘtre debout de bonne heure car le tĂ©lĂ©phone peut sonner Ă  tout moment.” Une astreinte permanente, “avec parfois des journĂ©es comme celle d’hier qui commencent Ă  5h et se terminent Ă  21h. Mais je ne vois pas le temps passer.” MĂ©tier passion, quand tu nous tiens.

Comment cette reconversion a-t-elle dĂ©barquĂ© dans la vie de  SĂ©verine Delmasse, aprĂšs avoir travaillĂ© pendant 20 ans en tant que commerciale dans le milieu bancaire ? “Par le biais d’un bilan de compĂ©tences, la profession de thanatopracteur s’est rĂ©vĂ©lĂ©e comme une Ă©vidence. Je l’avais en tĂȘte depuis plusieurs annĂ©es”. Avec cet accompagnement, SĂ©verine Delmasse qui l’a maintenant dans la peau, ce mĂ©tier, a pu cerner les raisons pour lesquelles la thanatopraxie allait lui ressembler Ă  ce point.

Les candidats admissibles au concours doivent avoir rĂ©alisĂ© 75 soins en autonomie, avant de prĂ©senter Ă  l’examen pratique

Et comment devient-on thanatopracteur ? Des enseignements thĂ©oriques sont dĂ©livrĂ©s sur une durĂ©e de 2 mois, 190 heures prĂ©cisĂ©ment, en fin d’annĂ©e. Le programme, court mais intense, comprend  10 matiĂšres*. Le concours d’admission, organisĂ© chaque annĂ©e au mois de janvier, comprend ensuite deux Ă©preuves de 3 heures Ă©crites chacune. Et les places pour obtenir le diplĂŽme national de thanatopraxie sont chĂšres. “La sĂ©lection s’effectue avec un numĂ©rus clausus, 400 candidatures sont dĂ©posĂ©es pour 65 pris, souligne SĂ©verine Delmasse. Ensuite, “pour pouvoir se prĂ©senter Ă  l’examen pratique, les admis doivent avoir rĂ©alisĂ© 75 soins en autonomie avant la fin de l’annĂ©e, sous la supervision du maĂźtre de formation ou de stage. ”. Un seuil fixĂ© Ă  75 soins depuis 2023, contre 100 soins auparavant.

Bien sĂ»r, les choses peuvent se faire en plusieurs Ă©tapes. “Je n’ai pas eu le concours la premiĂšre fois, tĂ©moigne SĂ©verine Delmasse. J’ai donc commencĂ© par travailler avec un thanatopracteur dans une petite entreprise sur Poitiers. Comme il n’arrivait pas Ă  faire dĂ©coller les ventes de ses produits, importĂ©s des Etats-Unis, je lui ai proposĂ© de m’occuper de sa prospection les trois-quart de mon temps. Et le quart restant, je me dĂ©plaçais avec lui pour assister aux soins et en voir un maximum”. De quoi rouler sa bille avant de passer le concours en janvier 2022, d’intĂ©grer l’école en septembre de la mĂȘme annĂ©e. “Comme j’avais arrĂȘtĂ© de travailler pour prĂ©parer mon examen, j’ai pu rĂ©aliser 300 soins avant de passer l’épreuve pratique en octobre 2022. J’ai Ă©tĂ© officiellement diplĂŽmĂ©e le 15 mars 2023. Je me suis ensuite installĂ©e”. Une fois diplĂŽmĂ©s, les thanatopracteurs ont le choix entre trois statuts : le salariat, le rĂ©gime indĂ©pendant ou le remplacement, pour celles et ceux qui souhaitent, entre autres raisons, ĂȘtre en vacances plus rĂ©guliĂšrement.

Blouse rose et bistouri

Soudainement les portes du funĂ©rarium s’ouvrent de l’intĂ©rieur, les coulisses d’un monde cachĂ© avec. Une dame brune glisse sa tĂȘte, chemisier Ă  fleurs et parole bienveillante : “SĂ©verine, Madame Claudine M.** est prĂȘte”.  Claudine M. est donc la dĂ©funte que nous sommes venus voir aujourd’hui. Ni une ni deux, notre thanatopractrice range sa vapote, ouvre son coffre et sort sa valise Ă  compartiments, la place sur un chariot sans oublier la trousse Ă  maquillage couleur citrouille posĂ©e sur le dessus. “C’est pour la toilette mortuaire. Vous ĂȘtes prĂȘte, on y va ?”

SĂ©verine Delmasse nous convie Ă  l’intĂ©rieur de cette piĂšce carrelĂ©e de gris, murs blancs et lumiĂšre blanche nĂ©on. Un mini-laboratoire plutĂŽt encombrĂ©. C’est qu’il y a du monde Ă  l’intĂ©rieur. On repĂšre trois portes de cases rĂ©frigĂ©rĂ©es, sorte de grands frigos oĂč les corps sont conservĂ©s avant la mise en biĂšre : une droit devant, deux sur notre gauche, prĂšs des chariots mĂ©talliques et d’un cercueil scellĂ© d’un cercle rouge, signe qu’il est occupĂ© et prĂȘt Ă  partir pour l’incinĂ©ration : non Claudine M., n’est pas la seule dĂ©funte prĂ©sente dans cette piĂšce. Nous apprendrons par la suite qu’une chambre funĂ©raire doit possĂ©der autant de cases rĂ©frigĂ©rĂ©es que de salons d’accueil.

“Aujourd’hui nous faisons une simple toilette mortuaire, prĂ©cise SĂ©verine Delmasse en enfilant sa blouse de protection rose. Mais je vais vous expliquer en quoi consiste un soin de conservation.” Le recours aux soins complets n’est donc pas automatique.” Ce choix va dĂ©pendre de ce que le dĂ©funt avait demandĂ© de son vivant ou de ce que les familles souhaitent si aucune volontĂ© de leur proche n’avait Ă©tĂ© partagĂ©e. La raison de se cantonner Ă  une toilette mortuaire peut Ă©galement ĂȘtre d’ordre financier si le coĂ»t est assurĂ© par les proches.

Racontez-nous un soin

D’un geste rapide et prĂ©cis, la thanatopractrice installe sa valise dans un coin, sort tous ces instruments de sa mallette pour les installer sur un plateau de mĂ©tal. Aux aguets, nous suivons du regard chaque ustensile courbĂ©, tranchant, long ou large.  Que trouve-t-on prĂ©cisĂ©ment dans cette panoplie dĂ©diĂ©e aux soins de conservation ?

“L’objectif d’un soin de conservation c’est de figer la dĂ©composition, de redonner un peu de couleur, de la souplesse sur la peau”, SĂ©verine Delmasse

“Pour un soin, une fois que le dĂ©funt est installĂ©, on utilise un bistouri pour pratiquer une incision au niveau de l’appendice xyphoĂŻde, aller chercher le cƓur et plus prĂ©cisĂ©ment une artĂšre que l’on positionne sur une lame sĂ©paratrice pour la sectionner, avant d’introduire une canule reliĂ©e Ă  un bidon sous pression qui va envoyer le formol. Le formol va rĂ©activer la circulation sanguine, pousser le sang en passant par les cellules et les tissus. L’idĂ©e c’est de figer la dĂ©composition, de redonner un peu de couleur, de la souplesse sur la peau. Une fois que le formol a fait le tour, il va dans le cƓur et comme le cƓur ne bat plus, il va grossir. C’est lĂ  que l’on utilise un trocart : avec des repĂšres thoraciques on insĂšre ce tuyau quand le cƓur est suffisamment gros pour en vider le sang. Ce sang, environ 5L en fonction de la corpulence, va partir dans une poche.” 

D’autres instruments vont permettre “d’aller chercher des artĂšres, les clamper, de nettoyer les ongles, couper les pansements, la moustache. Je me sers aussi de pinces pour nettoyer, poursuit la thanatopractrice. Lors de l’injection, j’utilise une pince dieffenbach pour Ă©viter que le flux ne reparte trop vers le visage qui est trĂšs fragile. Pour la suture de la bouche, j’utilise une aiguille courbe et pour les autres sutures, une aiguille serpentine.” Au total, il faut compter “1h30 pour un soin”.

Une toilette mortuaire physique et délicate

Une fois ces prĂ©sentations matĂ©rielles terminĂ©es, place Ă  la trousse de maquillage, la brosse Ă  cheveux et la tenue de change confiĂ©e par la famille. “J’aime que tout soit bien organisĂ©, tout sortir dĂšs le dĂ©part pour ne pas perdre de temps Ă  chercher dans mes affaires une fois que le soin et la toilette mortuaire ont commencĂ©. Comme ça je suis pleinement disponible, avec le dĂ©funt, pas le nez dans ma valise.” 

L’horloge tourne, il est prĂ©vu que la famille vienne rendre son unique visite Ă  Claudine M. dans la journĂ©e. Action rĂ©action SĂ©verine Delmasse se retourne sur ses baskets Ă  semelles compensĂ©es, ouvre la porte de la case rĂ©frigĂ©rĂ©e. Celle en face de nous. La tempĂ©rature, de -2 Ă  4°C maximum, vient refroidir la salle. Le regard scrute, en visu le bout d’une housse avec, a priori des pieds Ă  l’intĂ©rieur, apparaĂźt. “Je vous propose de me tourner le dos, je prends connaissance du corps et je vous dis ce qu’il en est, s’il est visible”, propose-t-elle. Bonne idĂ©e. Car personne n’est suffisamment armĂ© pour savoir comment rĂ©agir face Ă  un corps mort que l’on ne connaĂźt pas. Face Ă  un corps mort tout court, d’ailleurs. PrĂ©caution donc, Incipio fait volte face, la housse est dĂ©zippĂ©e et quelques secondes passent. Claudine M., dĂ©cĂ©dĂ©e Ă  51 ans, “est jolie. Il n’y a aucun dĂ©faut sur son visage. Elle est juste un peu rouge mais complĂštement visible. “Vous pouvez vous retourner.” Incipio s’accroche Ă  son calepin et se retourne pour une rencontre un peu spĂ©ciale, mais une rencontre quand mĂȘme. Une rencontre surtout. Incipio se surprend mĂȘme Ă  prononcer quelques mots, quelques phrases, adressĂ©es directement Ă  Claudine M. Nous avons en face de nous une personne morte, une personne. De but en blanc, SĂ©verine Delmasse commence Ă  dĂ©shabiller la dĂ©funte. Les gestes sont dĂ©licats et fermes Ă  la fois. 

Squat, spray huilé et putréfaction

Et manipuler un corps mort ne s’improvise pas. “J’adopte toujours la mĂȘme technique, dĂšs que je lĂšve une partie du corps je serre les abdos, je ne me penche jamais en avant, je me mets en position squat” pour les petits gabarits comme pour les plus robustes. Les thanatopracteurs n’ont pas le choix d’adopter les bonnes postures, “de protĂ©ger leur dos en permanence, pour tenir dans le temps”, dit-elle en enlevant le gilet bleu de Claudine M., en passant son t-shirt par-dessus sa tĂȘte et en enlevant son legging beige avant de lui recouvrir les jambes par le bas de la housse mortuaire, le temps de s’occuper de la partie haute de son corps. Claudine M. n’aura pas froid, simple question de dignitĂ©. “VoilĂ  comme ça vous ĂȘtes bien, je vous masse un peu les doigts Madame. AprĂšs le dĂ©cĂšs, plus le temps va passer, plus le corps va se raidir, nous explique SĂ©verine Delmasse. Les muscles se tendent, on vient donc assouplir les bras et le visage. C’est bien si les proches peuvent voir les mains sans qu’elles soient trop raides. J’essaie de toujours faire mon possible mĂȘme si parfois la couleur de la peau et l’apparence font que l’on est obligĂ© de les cacher”, sous la parure de la table funĂ©raire.

 â€œL’accueil des corps dans la chambre funĂ©raire se fait dans les 24 heures suivant le dĂ©cĂšs, 48 heures si des soins de conservation ont Ă©tĂ© effectuĂ©s.”

La question qui nous vient instinctivement ? De quoi est dĂ©cĂ©dĂ©e Claudine M. ? Sauf si cela impacte la toilette mortuaire ou le soin de conservation, le thanatopracteur n’est pas informĂ© du motif du dĂ©cĂšs. “Cela arrive que l’on trouve une chambre de chimiothĂ©rapie sur le corps du dĂ©funt, ce qui nous laisse supposer un dĂ©cĂšs par cancer. Certains accidents d’ordre traumatologique sont aussi parfois Ă©vidents.” Pour Claudine M. ce peut-ĂȘtre une crise cardiaque : “le teint rouge de sa peau laisse Ă  penser que le cƓur s’est arrĂȘtĂ© en premier, provoquant un afflux sanguin vers le visage. D’ailleurs une partie de son ventre et de sa poitrine sont rouges Ă©galement. Elle est peut-ĂȘtre dĂ©cĂ©dĂ©e en tombant sur l’avant de son corps et restĂ©e un certain temps dans cette position.” 

Poursuite de l’observation du cadavre. A priori, le processus de dĂ©composition – bien qu’invisible pour les novices – est en cours. “La peau sous son menton est en cours de putrĂ©faction, cela lui donne un aspect rouge et elle est trĂšs fine, elle se dĂ©sintĂšgre lĂ©gĂšrement sous mes doigts, explique la thanatopractrice. Claudine M. est dĂ©cĂ©dĂ©e il y a quelques jours, il Ă©tait temps de faire sa toilette.” Au fait, dans quel dĂ©lai les dĂ©funts sont-ils pris en charge dans un funĂ©rarium ? “L’accueil des corps dans la chambre funĂ©raire**** se fait dans les 24 heures suivant le dĂ©cĂšs, 48 heures si des soins de conservation ont Ă©tĂ© effectuĂ©s.

“Je veille Ă  suivre le mouvement naturel du cheveu pour que les proches puissent reconnaĂźtre le ou la dĂ©funt(e). C’est une intention importante, qu’il s’agisse d’un homme ou d’une femme.”

“Pour les yeux qui ne sont plus lubrifiĂ©s, on utilise ces petites lentilles”, continue SĂ©verine Delmasse, en nous montrant des petits opercules bombĂ©s et translucides, toujours guidĂ©e par sa souplesse et sa dextĂ©ritĂ©. “Elles permettent de rebomber l’Ɠil, nous prĂ©cise-t-elle. Je vais maintenant laver l’intĂ©rieur de la bouche et placer des cotons dans les orifices pour Ă©viter les Ă©coulements.” Puis, pour nettoyer le visage et redonner un teint plus naturel Ă  la dĂ©funte, la thanatopractrice s’équipe de son spray huilĂ© et d’une poudre. “J’utilise une huile pour le visage, et un shampoing sec quand les cheveux en ont besoin. Maintenant je vais vous recoiffer, prolonge SĂ©verine Delmasse en se munissant de sa brosse pour remettre en place quelques Ă©pis rebelles de l’épaisse chevelure chĂątain de Claudine M.. “Je veille Ă  suivre le mouvement naturel du cheveu pour que les proches puissent reconnaĂźtre le ou la dĂ©funt(e). C’est une intention importante, qu’il s’agisse d’un homme ou d’une femme”. 

La ligne de conduite est la mĂȘme pour les vĂȘtements. “Nous devons mettre aux dĂ©funts tout ce que la famille nous a confiĂ©, quels que soient les gestes que cela suppose, poursuit la thanatopratice en dĂ©pliant la tenue de Claudine M., qui sera la derniĂšre : un pantalon noir, un pull de maille beige clair et un chemisier bleu marine. “Je vais commencer par lui mettre une couche de protection dans le cas oĂč certains liquides seraient amenĂ©s Ă  couler, dĂ©crit la thanatopractrice en abaissant la housse puis le sous-vĂȘtement de Claudine M. Vous voyez, on arrive au monde avec un bracelet et une couche, et on repart de la mĂȘme façon, prononce calmement SĂ©verine Delmasse. Pour enfiler les vĂȘtements, les genoux et les Ă©paules se plient en souplesse sous les bras de la thanatopractrice, ses jambes se rĂ©haussent, ne dĂ©passent jamais les bords de la table Ă©troite. Des mouvements toniques mais jamais brusques. 

Parler aux vivants et aux morts

“Il y a deux phases dans mon mĂ©tier, dĂ©veloppe SĂ©verine Delmasse. La premiĂšre est esthĂ©tique, la seconde relĂšve de la conservation. En dĂ©but de soin, je commence par observer le corps, noter les points de vigilance. Si des petites choses ne vont pas dĂšs le dĂ©part, quant Ă  l’aspect du corps, on peut prĂ©venir les proches que la mise en biĂšre sera avancĂ©e”. 

“Le processus de deuil commence lĂ , quand les proches viennent voir le dĂ©funt.”

En rĂšgle gĂ©nĂ©rale, “si des retouches sont nĂ©cessaires, mais ça n’arrive que trĂšs rarement, les pompes funĂšbres s’en rĂ©fĂšrent aux thanatopracteurs. L’échange est totalement ouvert avec mes clients (les pompes funĂšbres, ndlr), les choses sont dites avec beaucoup de douceur. Je travaille dans un mĂ©tier oĂč il n’y a que de la sincĂ©ritĂ©. Le faux-semblant n’a pas sa place.” La responsabilitĂ© de ces professionnels de la mort, en revanche, oui. Le thanatopracteur est en effet la pierre angulaire entre la famille et le conseiller funĂ©raire qui va expliquer et vendre les  services. “Nous nous devons d’ĂȘtre irrĂ©prochables, pour nos clients, pour les proches car le processus de deuil commence lĂ , quand ils viennent voir le dĂ©funt”. 

Dans le mĂ©tier de thanatopracteur, les Ă©changes ne se limitent pas au monde des vivants. Pendant toute la toilette mortuaire, “comme vous avez pu le constater, je parle toujours aux dĂ©funts », dit SĂ©verine en rapprochant la table funĂ©raire rĂ©frigĂ©rante vers elle. En deux mouvements techniques, elle glisse le corps de Claudine M., allongĂ©e puis recouverte de la parure beige dorĂ©e dans un tissu Ă©pais. “Je veille Ă  ce que la tĂȘte ne penche pas d’un cĂŽtĂ© ni de l’autre”, ajuste la thanatopractrice. Claudine M. est prĂȘte, quelqu’un frappe Ă  la porte : “La famille est là”, glisse la voix suave et discrĂšte de l’agent de la chambre funĂ©raire. Une professionnelle disponible pour l’accueil des proches, l’amĂ©nagement du salon de prĂ©sentation. Selon les funĂ©rariums, l’agent funĂ©raire peut aussi rĂ©aliser la toilette mortuaire et accompagner le thanatopracteur dans les soins de conservation (aide Ă  la manipulation du corps, prĂ©paration et entretien des instruments).

SĂ©verine Delmasse hoche la tĂȘte et oriente la table mortuaire vers la porte pour transporter Claudine M. dans son salon d’accueil. LumiĂšre tamisĂ©e, moquette moelleuse, changement d’ambiance : c’est l’heure de la veillĂ©e. Derniers regards et derniĂšres paroles en prĂ©sence de la dĂ©funte. Incipio dit au revoir en silence Ă  Claudine M. et retourne dans la salle technique. SĂ©verine Delmasse dira quelques mots Ă  la famille avant de nous rejoindre. Claudine M., elle, sera inhumĂ©e le lendemain. “Il m’arrive de rencontrer les familles si elles en font la demande, ou si une information particuliĂšre doit ĂȘtre transmise. J’aime ce relationnel, autant que j’apprĂ©cie la solitude inhĂ©rente Ă  ce mĂ©tier, partage-t-elle quelques instants plus tard, autour d’un thĂ© chaud bienvenu sous la terrasse couverte de la chambre funĂ©raire.

De l’art d’ĂȘtre Ă  sa place

“Si on m’avait dit il y a 10 ou 20 ans que j’en serais lĂ , j’aurais sĂ»rement eu du mal Ă  y croire, avoue SĂ©verine Delmasse qui pourtant donne l’impression d’avoir fait ce mĂ©tier toute sa vie. Aujourd’hui, pour rien au monde, si ce n’est mes enfants bien sĂ»r, je ne remettrai en question ce que je fais. Ma prioritĂ© c’est mon mĂ©tier, ce sont les morts qui ont besoin de soin.” Une belle rencontre jusqu’à la derniĂšre poignĂ©e de main. SĂ©verine Delmasse retourne en salle, rejoindre ses dĂ©funts dans le calme des petits soins. Incipio reprend la route, scrutant les visages, ceux des passants, ceux des vivants.

*thanatopraxie ou soins de conservation, rĂ©glementation funĂ©raire, mĂ©decine lĂ©gale, hygiĂšne/sĂ©curitĂ© sanitaire/responsabilitĂ©, ergonomie et manutention, histologie/anatomie/physiologie, Ă©lĂ©ments de gestion des entreprises, sciences humaines de la mort/Ă©lĂ©ments de dĂ©ontologie et d’éthique. Pour plus de renseignements, rendez-vous au niveau de l’annexe 2 de l’arrĂȘtĂ© du 18 mai 2010 rĂ©glementant la formation au mĂ©tier de thanatopracteur

**par soucis d’anonymat, le prĂ©nom, l’initial, le jour du reportage, les dĂ©tails vestimentaires et l’ñge de la dĂ©funte ont Ă©tĂ© changĂ©s

***les frais de transport du corps et les soins de conservation peuvent ĂȘtre couverts par le dĂ©funt en cas d’anticipation, la famille ou l’établissement  hospitalier qui doit alors attester par Ă©crit du « transfert effectuĂ© Ă  la demande du directeur de l’Ă©tablissement, sans frais pour la famille »

****entre le dĂ©cĂšs et les funĂ©railles, les corps des dĂ©funts peuvent Ă©galement ĂȘtre conservĂ©s Ă  domicile, dans un institut mĂ©dico-lĂ©gal ou  dans une chambre mortuaire d’un hĂŽpital

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Sources

  • – Reportage SĂ©verine Delmasse, Chambre funĂ©raire de la Classerie 44 400 RezĂ©, novembre 2024
  • – MinistĂšre de la SantĂ© et de l’AccĂšs aux soins. Thanatopracteur (examen d’accĂšs au diplĂŽme national)

Consulté en novembre 2024. En ligne : https://sante.gouv.fr/metiers-et-concours/les-concours/liste-des-concours-et-examens-par-ordre-alphabetique/article/thanatopracteur-examen-d-acces-au-diplome-national


Paroles, confiance, sĂ©curitĂ© affective : quelles ressources permettent aux adultes d’aider les enfants Ă  apprĂ©hender la mort et le deuil ? Comment parler de la mort aux plus jeunes d’entre nous ? Et Ă  quel point les dessins et les livres sont-ils de prĂ©cieux supports pour les aider Ă  cheminer dans cette rĂ©alitĂ© qu’est la perte d’un ĂȘtre cher ? Les rĂ©ponses de Catherine Dolto, mĂ©decin pĂ©diatre, praticienne en haptonomie et Ă©crivaine. 

Parler de la mort aux enfants peut faire peur aux grandes personnes. Quand elle s’invite dans le quotidien des tout-petits, certains adultes peinent en effet Ă  formuler les choses telles qu’elles sont, Ă  dire les mots, les vrais mots. 

Mais l’honnĂȘtetĂ© et le choix des mots vont ĂȘtre essentiels au moment d’annoncer un dĂ©cĂšs, de rĂ©pondre concrĂštement Ă  toutes les questions des plus jeunes sur la disparition d’un ĂȘtre cher, Ă  commencer par son animal de compagnie. Et l’impact est loin, trĂšs loin, d’ĂȘtre anodin. Mettre un enfant de cĂŽtĂ© en lui cachant la rĂ©alitĂ© de la mort, aussi dure soit-elle, peut ĂȘtre plus nocif que de lui exposer la rĂ©alitĂ©. Les enfants sont d’ailleurs tout Ă  fait capables de capter une information authentique, sans mĂ©taphore ni symbole. En tant qu’adulte, vous pouvez donc vous baser sur la vĂ©ritĂ©, Ă  hauteur d’enfant, quand un proche dĂ©cĂšde ou que le sujet de la mort commence Ă  l’intriguer. 

Comment je prépare mon enfant à vivre les épreuves de la vie ?

Et cette position de vĂ©ritĂ© nourrit toute la relation qui lie les adultes aux enfants. “Il n’y a pas de vie sans mort, il n’y a pas de vie sans Ă©preuve. L’adulte doit toujours avoir en arriĂšre fond la question suivante : comment je prĂ©pare mon enfant Ă  vivre les Ă©preuves de la vie, que ce soit la mort, les Ă©checs, les accidents de la vie ?” Personne n’a la panoplie complĂšte pour y rĂ©pondre, mais les piliers sont :

  • “la sĂ©curitĂ© affective, c’est Ă  dire trouver quelqu’un Ă  qui parler de la mort, du deuil, dire Ă  l’enfant que vous ĂȘtes lĂ , qu’il n’est pas tout seul” pour traverser cette Ă©preuve.
  • “la comprĂ©hension par la parole et les mots en trouvant la bonne distance pour intĂ©grer les changements suite au dĂ©cĂšs d’un proche, et continuer Ă  vivre, Ă  aimer la vie”.

La sĂ©curitĂ© affective et la comprĂ©hension de ce que traverse l’enfant vont ĂȘtre importantes “pendant l’enfance, une pĂ©riode oĂč beaucoup de choses se passent en sous-terrain, et resurgissent plus tard dans la vie” si elles ne sont jamais dites. 

La vérité, pas forcément toute la vérité

La difficultĂ© dans un premier temps pour parler de la mort d’un proche, “c’est de saisir que ce n’est pas du tout la mĂȘme chose Ă  3 ans, Ă  7 ans, Ă  10 ans, souligne Catherine Dolto. Le dĂ©veloppement de l’enfant et de son cerveau diffĂšrent selon les Ăąges. Mais quelque-part, le discours reste toujours le mĂȘme pour introduire la notion de mort, et pour cela j’utilise toujours une formulation que je tiens de ma mĂšre*, qui est trĂšs apaisante pour les enfants : on ne meurt que quand on a fini de vivre”. Une phrase simple et claire qui parle aux petits, et aux plus grands. 

“Dire le vrai ce n’est pas forcĂ©ment dire tout de la vĂ©ritĂ©, n’importe comment et n’importe quand”, Catherine Dolto, mĂ©decin pĂ©diatre et Ă©crivaine

Si un adulte doit parler de la mort Ă  un enfant, je conseille donc de “dire le vrai et dire ce que l’on fait avec les restes du mort. Cette question est trĂšs intrigante pour les petits qui sont trĂšs pragmatiques et qui ont besoin de savoir, souligne Catherine Dolto. Mais dire le vrai ce n’est pas forcĂ©ment dire tout de la vĂ©ritĂ©, n’importe comment et n’importe quand.” L’adulte pourra donc se concentrer sur le fait de dire des choses justes sans forcĂ©ment raconter tous les dĂ©tails Ă  l’enfant.  

“Dire des choses vraies Ă  un enfant a un effet thĂ©rapeutique.”

D’ailleurs, “quand nous disons des choses vraies Ă  un enfant, ça Ă  un effet thĂ©rapeutique. Il sent qu’il est considĂ©rĂ© comme un sujet, qu’il est capable de comprendre le sens puisque l’on s’adresse Ă  lui.” C’est dans ce contexte que le dĂ©veloppement de l’enfant se fait bien, “lorsqu’il sent de la confiance et du soutien de la part des adultes qu’ils l’entourent”. Autant de raisons pour lesquelles il est bon de “parler aux enfants en leur disant des vrais mots, de se mettre Ă  sa place”. 

Le b.a.-ba des phrases Ă  adresser aux enfants

Bien sĂ»r, on ne s’adresse pas Ă  un petit comme on s’adresse Ă  un adolescent ou Ă  un adulte. Pas plus que nous avons Ă  leur cacher la vĂ©ritĂ©. “Beaucoup de parents surprotĂšgent leur enfant, projettent leurs propres fragilitĂ©s sur leur enfant. On passe en effet notre temps, nous les adultes, Ă  projeter sur les enfants ce que nous sommes. Or un enfant et un adulte ce n’est pas la mĂȘme chose. Bien sĂ»r toute l’intelligence est lĂ  chez l’enfant, dĂšs la naissance, mais il n’y a pas l’expĂ©rience, il n’y a pas la mĂȘme maĂźtrise du langage, la mĂȘme capacitĂ© de mettre les choses Ă  distance comme un adulte”.

Comment alors leur parler ? 

  • “Chez les tout-petits, c’est bien d’attendre que les questions viennent”, poursuit Catherine Dolto. Et s’il ne pose aucune question ? “On peut lui suggĂ©rer certains points, en lui demandant s’il a envie de savoir”, par exemple “OĂč va le corps de papi ?” A sa rĂ©action, l’adulte voit bien si l’enfant est curieux ou prĂ©fĂšre ne pas en entendre plus. 
  • Pour rĂ©pondre Ă  la question “c’est quoi la mort ?”, nous pouvons dire Ă  l’enfant que “ce qu’il reste de la personne, c’est sa forme humaine, dĂ©crit Catherine Dolto. Qu’il n’est plus lĂ , qu’il a fini de vivre, qu’il ne reviendra plus jamais, qu’il n’y a plus que les restes de son corps, que ce n’est plus lui et que c’est pour cela que l’on va l’honorer ”. Ces phrases, assez directes, “permettent Ă  l’enfant de comprendre que le corps est une enveloppe, une forme humaine que l’on investit en naissant. Et puis quand elle ne peut plus  fonctionner, on la quitte”. 
  • “Je conseille aussi d’éviter la phrase ‘Il est parti’”, poursuit Catherine Dolto. J’ai vu trop d’enfants en consultation, traumatisĂ©s parce qu’on leur a dit que le dĂ©funt Ă©tait parti et qu’ils attendaient encore qu’il revienne, en pensant souvent que s’il Ă©tait parti, c’était parce que l’enfant avait fait quelque chose de mal, parce qu’il n’était pas beau”, tĂ©moigne Catherine Dolto. “La vraie phrase, complĂšte, serait ‘il est parti pour un autre monde’. Mais elle ne va que pour les personnes qui croient en un monde aprĂšs la mort. Cette phrase ‘Il est parti’, tout comme ‘il est au ciel’ d’ailleurs, doit rester rĂ©servĂ©e aux adultes. Si l’on est chrĂ©tien par exemple, on peut dire que son Ăąme est au ciel, mais pas lui”.
  • “Leur dire que l’amour ne meurt pas, que les morts restent vivants dans notre cƓur, en nous, que ce que l’on a reçu d’elle, que ce n’est que le corps qui meurt, qu’il peut aller puiser dans ses souvenirs avec cette personne, lire les livres qu’il lisait avec elle. C’est une façon de transformer les fantĂŽmes en bonnes fĂ©es”.
  • “Lui expliquer que ‘dormir ce n’est pas mourir’, surtout aux enfants qui ont vu le dĂ©funt sur son lit de mort, qui dans le meilleur des cas Ă  l’air de dormir”. Une association qui peut engendrer des troubles du sommeil.
  • Bien dire Ă  l’enfant “que la personne dĂ©cĂ©dĂ©e ne l’a pas abandonnĂ©â€.

De façon gĂ©nĂ©rale, “il est important d’ĂȘtre au plus prĂȘt de la vĂ©ritĂ© en regardant bien l’enfant dans les yeux, en ayant bien en tĂȘte que ce qu’on lui dit fait image, amĂšne des images Ă  se former dans sa tĂȘte”. Et quand le message ne semble pas passer ? “Quand on parle Ă  un enfant, en effet, on voit parfois dans ses yeux qu’il n’a rien compris, ou que vos propos l’envoient sur des choses lointaines, abstraites. LĂ , il faut revenir sur ce qui a Ă©tĂ© dit, reformuler les choses diffĂ©remment.”

Parler, mĂȘme aux bĂ©bĂ©s

Et doit-on parler de la mort aux bĂ©bĂ©s, aux enfants de moins de 3 ans ? “A ce sujet, je pense que personne ne peut savoir ce qu’un bĂ©bĂ© peut comprendre, rĂ©pond Catherine Dolto qui connaĂźt, accompagne les enfants et leur Ă©crit des livres. Le dĂ©bat sur ‘pourquoi il faut parler ou non aux bĂ©bĂ©s’ est, pour moi, inepte. Le cerveau de l’enfant est fait pour parler. DĂšs sa vie prĂ©natale, il est dans le bain, il perçoit les vibrations et entend les modulations des voix. Ensuite, dĂšs que l’enfant naĂźt, le bĂ©bĂ© est un joueur de poker, il cherche tout le temps Ă  comprendre les rĂšgles du jeu. Pour la parole, c’est la mĂȘme chose. Il est donc essentiel de leur parler, mĂȘme s’ils sont encore petits et ne maĂźtrisent pas le langage”. 

Nous savons que “l’enfant comprend ce qu’il se passe autour de lui bien avant de pouvoir parler. Pour aller plus loin, “je dirai mĂȘme que “les bĂ©bĂ©s ont l’entendement du sens  de ce qui est dit quand on leur parle avec la certitude que l’on s’adresse Ă  eux comme Ă  des ĂȘtres intelligents”.

Une question d’égo
 sans culpabilisation Ă  avoir

Autre point : “les enfants naissent totalement Ă©gocentrĂ©s, et c’est normal, prolonge Catherine Dolto. Tout le processus Ă©ducatif est une dĂ©sĂ©gocentrisation”. 

Cette notion d’ego va entrer en ligne de compte lorsque l’enfant va vivre un deuil. “Cette perte va provoquer un remaniement extrĂȘme et rapide chez l’enfant. Et pour les plus jeunes, centrĂ©s sur le quotidien, les premiĂšres questions qui vont venir sont souvent d’ordre pratique et pragmatique, mĂȘme s’ils aiment beaucoup la personne qui est dĂ©cĂ©dĂ©e : ‘Qui viendra me chercher Ă  l’école ? Et qui fera mon goĂ»ter ?’. Ce n’est pas de l’égoĂŻsme comme celui que l’on associe Ă  l’adulte, et il ne faut surtout pas les culpabiliser. C’est tout Ă  fait normal, c’est mĂȘme trĂšs sain, ça fait d’ailleurs partie de la sĂ©curitĂ© affective qui est aussi faite de choses matĂ©rielles oĂč l’enfant a besoin de savoir qui va s’occuper de lui.”

Quand consulter ?

Les parents ne sont pas les seules personnes Ă  pouvoir accompagner les enfants dans la comprĂ©hension de la mort et le vĂ©cu d’un deuil. Des adultes rĂ©fĂ©rents, issus du cercle familial ou amical, peuvent aussi intervenir naturellement s’ils entretiennent un lien de proximitĂ© avec l’enfant. Souvent les plus jeunes savent vers quelle(s) personne(s) de confiance se tourner, et vice versa, et les choses se font d’elles-mĂȘmes. 

Quand des professionnels de la santĂ© ? “Aujourd’hui, on a tendance Ă  penser que tout chagrin est dĂ©pressif, atteste Catherine Dolto. Mais non ce n’est pas la mĂȘme chose. Avoir du chagrin, c’est normal, ça va nous modifier, nous occuper un certain temps.” Cette tristesse peut ĂȘtre lourde Ă  porter et nĂ©cessite parfois de consulter un spĂ©cialiste de la petite enfance, pĂ©diatre ou pĂ©dopsychiatre. Comment savoir si l’enfant a besoin de voir quelqu’un ? 

  • “Quand il s’agit de la mort d’un adulte, on consulte quand on voit que l’enfant est trop dĂ©rangĂ© 3 semaines aprĂšs le dĂ©cĂšs, dans ce qu’il a Ă  faire de sa vie, Ă  l’école, en famille, avec ses amis, dĂ©crit Catherine Dolto. Ou encore si l’enfant est colĂ©rique, et/ou qui se met en Ă©chec, car ce peut ĂȘtre le signe d’une grande tristesse ou d’une dĂ©pression. Ce dĂ©rangement peut ĂȘtre d’autant plus aigu si les adultes autour de l’enfant n’arrivent pas eux-mĂȘmes Ă  faire leur deuil”. Dans ce cas, la consultation sera plus adressĂ©e aux parents.
  • Quand il s’agit de la mort d’un frĂšre ou d’une sƓur, “cela vaut le coup de donner l’occasion Ă  l’enfant de parler une fois ou deux, seul, Ă  quelqu’un”. Pour quelles raisons prĂ©cises ? “Dans les fratries, il y a des tensions, des disputes, des vƓux de mort de l’autre, de la jalousie” : tout un panel d’émotions vives qui “peuvent rĂ©veiller de la culpabilitĂ©, un poison trĂšs violent. Il suffit parfois de l’écouter, de lui parler, de voir ce qu’il fait en pĂąte Ă  modeler, avec quelqu’un qui ne va pas le juger. Cette parole aide l’enfant Ă  dĂ©culpabiliser, en lui rappelant bien qu’il n’a rien fait de mal.”

Dessins, livres et dédramatisation

“Tout ce qu’il ne peut ou ne veut pas dire, l’enfant va l’exprimer en dessin, en chanson. On peut lui proposer de dessiner, lui proposer de dire ce qu’il y a sur son dessin sans plaquer notre vĂ©ritĂ© de grande personne sur ce qu’il a dessinĂ©. Il est aussi important de garder ses dessins car il sera peut-ĂȘtre un jour trĂšs content de les retrouver.”

Au temps prĂ©sent, ces dessins peuvent aider l’adulte “à parler de comment l’autre nous manque, Ă  dĂ©dramatiser la mort, en reprĂ©sentant la mort comme un Ă©vĂ©nement de la vie, que l’amour permet d’en parler entre vivants. Je conseille aussi de laisser traĂźner les livres Ă  la maison, de leur raconter parfois les mĂȘmes livres pendant un mois s’ils le demandent”.

Pour aller plus loin : Catherine Dolto a publiĂ© le livre “Si on parlait de la mort” dans la collection Mine de Rien. De prĂ©cieux textes et illustrations pour choisir les bons mots et rĂ©pondre aux questions des enfants Ă  l’aide d’images. 

*Catherine Dolto est la fille de Françoise Dolto (1908-1988) célÚbre pédiatre et psychanalyste française, particuliÚrement engagée dans la pédagogie infantile

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Sources

  • – Interview de Catherine Dolto, mĂ©decin pĂ©diatre, praticienne en haptonomie et Ă©crivaine, le 13 novembre 2024


Perdre un animal de compagnie peut laisser un vide Ă©norme dans votre quotidien. Le processus de deuil d’un chat, d’un chien ou d’un cheval va-t-il ĂȘtre le mĂȘme qu’un deuil d’un proche humain ? Pourquoi la tristesse n’est-elle pas toujours considĂ©rĂ©e Ă  sa juste hauteur ? Les rĂ©ponses d’IrĂšne Combres, accompagnante spĂ©cialiste du deuil animalier Ă  Morsang-sur-Orge (Essonne). 

Par dĂ©finition les animaux de compagnie partagent notre quotidien, nos rituels, notre routine sans oublier le “prendre soin” permanent en le nourrissant et en l’amenant chez le vĂ©tĂ©rinaire. De vraies petites boules de poils auxquelles certains et certaines d’entre nous s’attachent vĂ©ritablement, Ă©prouvent de trĂšs forts sentiments d’affection.

Ainsi, quand ils dĂ©cĂšdent, les animaux de compagnie laissent souvent leur maĂźtre dans une profonde solitude. TrĂšs peu de gens comprennent en effet  ce qu’ils Ă©prouvent. “La formule ‘ce n’était qu’un chien’ revient souvent dans la bouche de certains interlocuteurs. Ou bien encore “Prenez-en un autre, ça ira mieux ensuite”. Ne prĂȘtez pas attention Ă  ces propos, ne cherchez pas Ă  convaincre de la profondeur de votre chagrin”, atteste Michel Fize, sociologue et fervent dĂ©fenseur de la cause animale.  

Ce sentiment de solitude face au deuil d’un animal, IrĂšnes Combres en sait quelque chose. “Dans ma vie j’ai toujours eu des chiens et des chats, je serai mĂȘme incapable de vivre sans. J’en ai Ă©videmment perdu beaucoup. Et sur mon chemin j’ai rencontrĂ© beaucoup de personnes dans l’incomprĂ©hension totale face Ă  la douleur que j’ai pu Ă©prouver, raconte cette coach spĂ©cialisĂ©e dans le deuil animalier. Je me suis donc documentĂ©e sur le sujet. Ces lectures m’ont permis de me sentir forte dans cette Ă©preuve, de vivre la perte de mes animaux avec plus de sĂ©rĂ©nitĂ© malgrĂ© la douleur”. Par la suite, IrĂšne Combres dĂ©cide d’en faire son mĂ©tier en se formant Ă  l’accompagnement du deuil humain dans un premier temps auprĂšs de l’association Empreintes, avant de se spĂ©cialiser dans le deuil animalier.

IrÚne Combres en vidéo !

https://drive.google.com/file/d/1Ilk5O8xrHz_CUoIQFI3N8dwF2HHOwej5/view

Quelle est la mission de ces accompagnements ?

“Je ne suis pas thĂ©rapeute, mais je suis certifiĂ©e et formĂ©e pour Ă©couter activement les gens sans juger, leur donner des repĂšres en leur expliquant que leurs Ă©motions sont complĂštement normales. En perdant leur animal de compagnie, ils vont traverser toutes les phases du deuil qui ne sont pas spĂ©cifiques Ă  celui des humains et il n’y a aucune honte Ă  avoir”. 

Quelles approches face au deuil animalier ?

On l’aura compris : en exprimant leur ressenti, les personnes se sentent moins seules face Ă  ce sujet qui peut paraĂźtre anecdotique pour beaucoup de personnes. Mais quels conseils donner en particulier ? 

  • Replacer les phases du deuil animalier dans leur contexte : le dĂ©ni (le refus d’accepter la rĂ©alitĂ© de la mort), la colĂšre (souvent tournĂ©e vers les vĂ©tĂ©rinaires, la famille voire l’animal dĂ©cĂ©dĂ©) la culpabilitĂ© (liĂ©e Ă  la responsabilitĂ© du maĂźtre, un sentiment trĂšs fort notamment dans les cas d’euthanasie s ‘il a fallu prendre la dĂ©cision de piquer l’animal), la dĂ©pression (une pĂ©riode souvent brĂšve liĂ©e Ă  la solitude qui se traduit par une perte d’appĂ©tit, des troubles du sommeil et des remĂ©morations envahissantes), la rĂ©siliation (l’acceptation de la perte qui n’empĂȘche pas la tristesse et la capacitĂ© de remettre en perspective le dĂ©cĂšs en reprenant pied dans leur vie)
  • “Souligner le fait que la sociĂ©tĂ© a du mal Ă  admettre qu’un individu Ă©prouve du chagrin ou des Ă©motions trĂšs intenses et qu’ils ne sont donc pas seuls dans cette situation.” Vraiment pas les seuls Ă  faire face Ă  des personnes nĂ©gligeant l’impact de ces pertes a priori bĂ©nignes. Comme le rappelle le sociologue Michel Fize, “il ne faut pas avoir honte de ce chagrin, et encore moins honte de l’exprimer. La peine ressentie est normale. Toute sĂ©paration d’avec un ĂȘtre vivant, qu’il soit homme ou “bĂȘte”, est une tragĂ©die dont on se remet difficilement”.
  • Informer sur le fait que la science reconnaĂźt aujourd’hui le lien affectif parfois trĂšs puissant qui se tisse entre un maĂźtre et l’animal. “Certaines personnes Ă©prouvent mĂȘme des sentiments plus intenses avec leur animal de compagnie qu’avec un autre ĂȘtre humain, poursuit IrĂšne Combres. La perte peut donc s’avĂ©rer plus difficile Ă  vivre”.

En rĂšgle gĂ©nĂ©rale, les personnes en deuil ne viennent voir IrĂšnes Combres qu’une seule fois. MĂȘme si cette derniĂšre reste joignable par sms en cas de coup au moral, et que bien sĂ»r sa porte reste ouverte si les personnes ressentent le besoin de se confier, de dĂ©charger sur un temps plus long.

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Sources

  • – Interview d’IrĂšne Combres, accompagnante spĂ©cialiste du deuil animalier Ă  Morsang-sur-Orge (Essonne), le 29 octobre 2024
  • – Happy End. Comment survivre Ă  la disparition d’un animal de compagnie, les conseils de Michel Fize. ConsultĂ© en novembre 2024 : https://www.happyend.life/comment-survivre-a-la-disparition-dun-animal-de-compagnie/


Vous venez de perdre un proche et ĂȘtes chargĂ©(e) de verser des dons pour une cause qui lui Ă©tait chĂšre ou bien pour l’organisation de ses funĂ©railles. INCIPIO vous Ă©claire sur la marche Ă  suivre pour faire les choses bien en rĂšgle.

Il est possible de prolonger la gĂ©nĂ©rositĂ© au-delĂ  de la vie. Comment ? En effectuant un don suite au dĂ©cĂšs de l’un de vos proches. Une idĂ©e d’autant plus simple Ă  concrĂ©tiser si le ou la dĂ©funt(e) Ă©tait engagĂ©(e) dans une cause en particulier (social, recherche
) ou avait certains centres d’intĂ©rĂȘt prononcĂ©s.

Tout d’abord revenons sur les diffĂ©rents contextes dans lesquels ces dons surviennent. La plupart du temps, cette forme de charitĂ© vient :

  • financer des frais d’obsĂšques : une contribution intĂ©ressante notamment si le dĂ©funt n’a pas pu anticiper les dĂ©penses engendrĂ©es par ses funĂ©railles et que l’intĂ©gralitĂ© de ses coĂ»ts incombe Ă  la famille
  • soutenir la recherche mĂ©dicale : une somme d’argent le plus souvent versĂ©e pour honorer la mĂ©moire du dĂ©funt, en participant Ă  l’amĂ©lioration des connaissances de la pathologie ayant coĂ»tĂ© la vie au dĂ©funt, et au dĂ©veloppement de traitements. Ce peut aussi ĂȘtre le cas lorsque le dĂ©cĂšs trouve son origine dans des incidents (accidents de la route, noyades
) ou autres conditions particuliĂšres
  • financer toute autre cause, liĂ©e Ă  un centre d’intĂ©rĂȘt, une passion, un engagement caritatif parfois Ă  un degrĂ© plus militant (Ă©cologie, droit des animaux
)

La dĂ©marche de don doit, dans un principe de respect et d’éthique, ĂȘtre adaptĂ©e aux aspirations du dĂ©funt de son vivant.

Nécrologie et précautions à prendre

La famille est responsable des souhaits de donation. Vous devez faire part de ce don Ă  tout interlocuteur Ă  qui vous avez affaire en lien avec la gestion administrative et financiĂšre quant Ă  l’organisation des funĂ©railles et de ses suites. C’est au niveau du mĂ©morial, de la nĂ©crologie ou l’invitation aux funĂ©railles que ce souhait de dons figure. Pour simplifier la procĂ©dure, vĂ©rifiez qu’une seule et mĂȘme personne de la famille sera chargĂ©e de gĂ©rer ce sujet. 

Avant d’effectuer ce don, il est conseillĂ© de vĂ©rifier du sĂ©rieux de l’organisation Ă  laquelle la somme d’argent sera versĂ©e. En effet, nous ne sommes jamais Ă  l’abri de services peu scrupuleux ou d’arnaques en ligne. Voici quelques points Ă  effectuer :

  • – VĂ©rifier le site internet pour jauger du sĂ©rieux de l’organisme. MĂ©fiez-vous si vous ne trouvez aucune information sur la rĂ©tribution prĂ©cise des dons suite Ă  un dĂ©cĂšs
  • – Cherchez des avis tĂ©moignant d’expĂ©riences passĂ©es pour vous assurer qu’aucune dĂ©convenu systĂ©matique ne survienne dans le traitement des dossiers
  • – RepĂ©rer les escroqueries en ligne en vĂ©rifiant que l’organisme Ă  laquelle le don est censĂ© ĂȘtre versĂ© correspond bien au site sur lequel vous ĂȘtes connectĂ©(e)
  • – Assurez-vous de la transparence sur l’utilisation de vos dons. Certaines organisations laissent mĂȘme le choix Ă  la famille de financer tel ou tel projet
  • – Prenez le temps de gĂ©rer le versement de ce don sans vous prĂ©cipiter aprĂšs le dĂ©cĂšs, pour ĂȘtre certain(e) de faire le bon choix et de ne pas choisir malgrĂ© vous une organisation qui s’avĂ©rerait ne pas ĂȘtre la bonne

Les dons s’effectuent le plus souvent par un paiement en ligne sur le site de l’organisation. Un certificat d’honneur est remis Ă  la famille suite au don. Conservez bien une trace de ce don : ce document vous sera prĂ©cieux au moment de remplir votre dĂ©claration d’impĂŽts, les dons Ă©tant logiquement dĂ©ductibles.

AprĂšs un don, la plupart des organisations vous proposent de rester en contact pour vous informer du devenir de votre don sur les moyen et long termes. Il existe mĂȘme souvent des communautĂ©s de donneurs que vous pouvez intĂ©grer. Un bon moyen de rester en contact avec la mĂ©moire de votre proche dĂ©cĂ©dĂ©. 

Si vous souhaitez collecter une somme d’argent autrement que par le don traditionnel, pourquoi ne pas crĂ©er une cagnotte en ligne ? Ce principe de crowdfunding se retrouve aujourd’hui dans le milieu funĂ©raire et des obsĂšques. Avantage : le montant versĂ© par chaque personne n’est pas communiquĂ© et l’anonymisation du don est possible. A ce sujet, il existe la cagnotte des proches qui vous permet de rĂ©colter de l’argent lors de la diffusion de l’avis de dĂ©cĂšs et de le donner Ă  des associations. 

#décÚs #deuil #don #associations #solidarité

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Sources

  • – Service Public. Dons, donations et legs au bĂ©nĂ©fice d’une association. ConsultĂ© en octobre 2024. Disponible : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F2722
  • – Service Public. Crowdfunding ou financement participatif. ConsultĂ© en octobre 2024. Disponible : https://entreprendre.service-public.fr/vosdroits/F33957


Pour traverser l’épreuve difficile du deuil, pourquoi ne pas bĂ©nĂ©ficier des mĂ©decines complĂ©mentaires dites douces ? Quels thĂ©rapeutes consulter ? INCIPIO vous prĂ©sente  quelques idĂ©es. Attention liste non exhaustive !

La perte d’un proche, d’un ĂȘtre cher, va engendrer de nombreuses Ă©motions parfois complexes. Des Ă©tapes au cours desquelles un accompagnement peut ĂȘtre nĂ©cessaire pour attĂ©nuer la douleur, pour retrouver un Ă©quilibre intĂ©rieur.

Prendre soin de votre corps, de votre tĂȘte, laisser libre cours Ă  vos Ă©motions, bĂ©nĂ©ficier de l’aide de professionnels en privilĂ©giant la parole ou Ă  l’inverse ce que votre corps a Ă  dire au-delĂ  des mots, de l’intellect : voici ce que peuvent permettre les mĂ©decines douces. Ces approches sont connues pour vous aider Ă  vous « concentrer sur la stimulation de la capacitĂ© du corps Ă  se guĂ©rir via l’alignement Ă©nergĂ©tique, (
) et d’autres techniques d’Ă©quilibrage Â». A quelles approches peut-on penser en particulier ?

La sophrologie : la sophrologie apporte du rĂ©confort. Comment ? Par des techniques de respiration, de relaxation et de visualisation connues apaisant le systĂšme nerveux et activant les mĂ©canismes de rĂ©cupĂ©ration Ă©motionnelle. Un chemin vers la paix intĂ©rieure, une façon de voir diminuer le niveau de stress, d’anxiĂ©tĂ©, de cultiver l’harmonie entre le corps et l’esprit, d’éloigner les pensĂ©es sombres rĂ©currentes, en sentant la souffrance s’apaiser au fil des sĂ©ances. Par une exploration des Ă©motions, et une acceptation de ces derniĂšres, l’objectif de la sophrologie est aussi d’apprendre Ă  ne pas se juger : un pas important dans la guĂ©rison Ă©motionnelle.

Le yoga, basĂ© sur l’harmonie du corps et de l’esprit, attĂ©nue les symptĂŽmes d’un syndrome anxio-dĂ©pressif ou encore d’une dĂ©pression. Il participe aussi Ă  une meilleure gestion des Ă©motions dans la vie de tous les jours. Sous l’effet d’une pratique rĂ©guliĂšre, certaines rĂ©gions du cerveau peuvent augmenter en volume, et leur activitĂ© gagner en intensitĂ©. Des zones cĂ©rĂ©brales* par ailleurs impliquĂ©es dans la rĂ©gulation des Ă©motions, la maĂźtrise de soi, l’attention, la mĂ©moire de travail, les pensĂ©es tournĂ©es vers soi et les autres. Le yoga amĂ©liore les performances cognitives souvent malmenĂ©es lorsque la tristesse ou la colĂšre s’emparent de nous. Toutes ces vertus sont rendues possibles par le fait que le yoga convoque les trois piliers suivants :  la mĂ©ditation, l’exercice physique et le travail du souffle. A noter que le Tai chi et le Qi gong vont aussi solliciter la respiration et la notion d’équilibre pour diminuer le stress, avec un effort moindre que la plupart des formes de yoga. 

L’acupuncture va agir sur le niveau de stress. Par quelles maniĂšres ? En apposant ses fines aiguilles sur des points Ă©nergĂ©tiques prĂ©cis, le praticien dĂ©lie les blocages notamment au niveau du sternum, des poignets et de la base du crĂąne. Le yoga, basĂ© sur la mĂ©decine chinoise, va aussi attĂ©nuer les troubles du sommeil. En agissant sur les dĂ©sĂ©quilibres Ă©nergĂ©tiques situĂ©s sur des mĂ©ridiens diffĂ©rents (cƓur, rate, reins), il est possible de mettre le corps dans un Ă©tat de calme capable de favoriser le sommeil. Les migraines et les addictions parfois prĂ©sentes lors des Ă©preuves de la vie peuvent aussi ĂȘtre attĂ©nuĂ©es par l’acupuncture.

La rĂ©flexologie : bien plus qu’un simple massage, la rĂ©flexologie va venir activer des zones dites rĂ©flexes, du pied (rĂ©flexologie plantaire), des mains (rĂ©flexologie palmaire), du visage (rĂ©flexologie faciale) ou des oreilles (rĂ©flexologie auriculaire). Chaque point correspond Ă  un organe en particulier. En le massant , le spĂ©cialiste agit Ă  distance des organes sur le stress, la fatigue, l’anxiĂ©tĂ© ou encore les troubles du sommeil.

La mĂ©decine complĂ©mentaire ne remplace pas la mĂ©decine classique (dite allopathique). Aucun traitement mĂ©dicamenteux contre la dĂ©pression par exemple, ou consultations chez un psychiatre dans l’accompagnement d’un trouble anxieux, ne pourront ĂȘtre remplacĂ©s par la mĂ©decine douce. Par ailleurs, il peut ĂȘtre utile d’associer les deux suivis – mĂ©dical et doux – pour prendre soin de vous de la façon la plus complĂšte possible. 

Pour aller plus loin : INCIPIO a publié un article pour vous renseigner sur les médecins à consulter en cas de besoin pour traverser un deuil.

*l’hippocampe, le lobe temporal, l’insula et le cortex singulaire

Article écrit par Laura Bourgault

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Sources


Les doulas sont connues pour accompagner la grossesse, le post-partum, les suites d’une interruption volontaire/mĂ©dicale de grossesse. A l’autre bout de la vie, certaines doulas apportent leur soutien aux patients dans leur dernier souffle et aux proches confrontĂ©s au dĂ©cĂšs, au deuil. Incipio dĂ©taille toutes les aides possibles qui peuvent ĂȘtre prodiguĂ©es par ces personnes, qui sont le plus souvent des femmes.

Les doulas de fin de vie, aussi appelĂ©es thanadoulas, interviennent au domicile des patients atteints d’une maladie incurable en soins palliatifs, et/ou aprĂšs le dĂ©cĂšs pour apporter son soutien aux proches, les aider Ă  accepter la disparition et Ă  poser des mots parfois tabous sur la mort, sur les Ă©motions autour du deuil.

Chaque doula a sa propre approche

En fonction de ses compĂ©tences, des sujets sur lesquels elle/il est plus l’aise, et bien sĂ»r des besoins de chaque personne, de chaque famille, la doula peut apporter son soutien sur le plan relationnel (discussions ouvertes, Ă©changes facilitĂ©s sur les sujets parfois complexes), logistique (courses, mĂ©nage, cuisine
) ou encore administratif (gestion des contrats d’obsĂšques, assurances, banque
). Ce soutien peut ĂȘtre mis en place pour une seule personne ou le groupe (famille, amis). 

Certain(e) doulas sont spĂ©cialisĂ©(e)s sur l’accompagnement d’un(e) patient(e) en fin de vie, pour aider le malade et les proches Ă  faire face Ă  la douleur, Ă  l’angoisse de la disparition. Dans certains cas, des conseils peuvent aussi ĂȘtre prodiguĂ©s sur les questions d’ordre Ă©thique comme la responsabilitĂ© de la personne de confiance ou encore les dĂ©marches concernant le don et le prĂ©lĂšvement d’organes. Des conseils sur les droits de succession et l’hĂ©ritage peuvent aussi ĂȘtre dĂ©livrĂ©s. Au-delĂ  de tous ces points pratiques, la doula peut ĂȘtre bienvenue par sa simple prĂ©sence, sa bienveillance et sa capacitĂ© Ă  Ă©couter, rĂ©conforter, tenir compagnie sans ĂȘtre envahissant(e) dans le quotidien des proches confrontĂ©s Ă  la maladie incurable Ă  un stade terminal ou  endeuillĂ©s.  Et Ă  crĂ©er des espaces de parole lĂ  oĂč le silence et le dĂ©ni prennent parfois trop de place.

Enfin, de la mĂȘme maniĂšre que les prĂȘtres, les imams et les rabbins soutiennent religieusement la patient en fin de vie et/ou les proches du dĂ©funt, la doula va pouvoir apporter sa touche de spiritualitĂ© si elle/il le souhaite. Et si bien sĂ»r un besoin a Ă©tĂ© formulĂ© en ce sens.

En France, les doulas de fin de vie restent encore rares. Aux Etats-Unis en revanche, le nombre de personnes sensibilisĂ©es et formĂ©es Ă  cette pratique ne fait qu’augmenter, depuis que la crise sanitaire du Covid-19 a exposĂ© nombre de citoyens Ă  la mort. Ainsi, les instituts ou centres de formation ont essaimĂ© dans le pays pour compter 1 545 personnes (chiffres janvier 2024), contre 260 rĂ©pertoriĂ©s en 2019 par la National End-of-Life Doula Alliance (NEDA). Il s’agit en trĂšs grande majoritĂ© de femmes. 

Les pays oĂč les thanadoulas pratiquent le plus sont l’Australie, le Canada, le Royaume-Uni et les Etats-Unis. Une pratique facilitĂ©e lorsque “les dĂ©cideurs politiques et les dĂ©fenseurs des droits de l’homme” trouvent des moyens “pour remĂ©dier aux inĂ©galitĂ©s persistantes en matiĂšre de santĂ© maternelle et infantile”, relaient les auteurs d’une Ă©tude menĂ©e sur le sujet dans les colonnes du Maternal and Child Health Journal. Plusieurs Etats dont la Californie ont d’ailleurs fait le choix de couvrir les frais des services des Doulas par Medicaid (l’équivalent de la SĂ©curitĂ© sociale en France).

Mais qui peut venir doula de la fin de vie ?

Il peut s’agir d’infirmier(e)s, de psychologues, de gĂ©rontologues, de gĂ©rontopsychologues encore en exercice ou non. Il peut Ă©galement s’agir de thĂ©rapeutes du deuil. Ou toute personne qui, en plus d’avoir un attrait pour le relation d’aide, la fin de vie, la mort et les processus du deuil, dispose de capacitĂ©s, d’une certification, pour ĂȘtre lĂ©gitime et bienfaisante Ă  intervenir sur des sujets aussi sensibles. 

Reste que la pratique des doulas de fin de vie n’est pas officiellement rĂ©glementĂ©e, pas plus que la rĂ©munĂ©ration, ni aux Etats-Unis ni en France ni Ă  l’échelle mondiale. L‘International End-of-Life Doula Association (INELDA) a formĂ© plus de 5 600 doulas dans le monde, mais avec une forte disparitĂ© dans le contenu de ces programmes ne permettant pas de faire consensus sur un socle de connaissances et de pratiques Ă  l’échelle mondiale. “L’INELDA propose par exemple une formation de quarante heures aux fondements du travail des doulas et l’accompagnement des mourants. D’autres programmes de formation proposent des cours en personne de quatre semaines, des cours en ligne de douze semaines, des programmes de six semaines, entre autres formats.” Selon les auteurs d’un travail publiĂ© dans la revue Health & Social Care in the Community, “l’absence d’un modĂšle commercial pour les doulas de fin de vie crĂ©e des incohĂ©rences entre les services qu’offrent ces accompagnants et les attentes des patients et de leurs familles”. 

En France, sans pour autant que la compĂ©tence de doula soit reconnue, l’association Doulas de France propose des formations, une charte des doulas de France, un socle initial de compĂ©tences ainsi qu’un annuaire des thanadoulas et doulas de fin de vie

Le risque de dĂ©rive reste un sujet de prĂ©occupation de la Miviludes (Mission interministĂ©rielle de vigilance et de lutte contre les dĂ©rives sectaires) qui appelait Ă  la vigilance” dans un rapport concernant les doulas (de la naissance). La Miviludes s’inquiĂ©tait prĂ©cisĂ©ment du risque de « thĂ©rapies alternatives problĂ©matiques ».  Le risque, sans tomber dans la paranoĂŻa, est donc celui de la dĂ©rive Ă©thique voire sectaire et de recevoir l’aide de quelqu’un de finalement non compĂ©tent ou malveillant si elle Ă©tait passĂ©e entre les mailles de toute formation ou d’une formation peu sĂ©rieuse. 

Pour lutter contre ce risque de dĂ©rive, des Ă©tudes sont menĂ©es notamment aux Etats-Unis afin d’amĂ©liorer les pratiques et formaliser les certifications en impliquant les doulas, les professionnels de santĂ©, les chercheurs, les dĂ©fendeurs des droits et les utilisateurs.

Les doulas n’ont aucune compĂ©tence mĂ©dicale ni droit d’exercer un soin

En aucun cas la pratique des doulas de fin de vie n’est associĂ©e Ă  une profession de santĂ©, mĂ©dicale ou paramĂ©dicale. Aucun(e) doula de fin de vie n’est en droit d’administrer un mĂ©dicament, de surveiller des signes vitaux, de donner des conseils ou de prodiguer des gestes d’ordre mĂ©dical. Aucune valeur, aucun jugement ne doit ĂȘtre dĂ©livrĂ© par la/le doula qui se doit de maintenir une position neutre malgrĂ© le soutien.

Si vos besoins plus spĂ©cifiques dĂ©passent le savoir-faire d’un(e) doula, n’hĂ©sitez pas Ă  en parler Ă  votre mĂ©decin traitant qui saura vous diriger vers un spĂ©cialiste de la fin de vie et/ou du deuil si nĂ©cessaire. Pour les questions d’ordre plus pratique, certaines associations sont disponibles pour vous aider : Empreintes association dispose par exemple d’une ligne d’écoute et de groupes de parole. Pour en savoir plus sur les associations françaises spĂ©cialisĂ©es en la matiĂšre, n’hĂ©sitez pas Ă  consulter l’article INCIPIO consacrĂ© Ă  ce sujet.

Pour aller plus loin : lire les “Cahiers francophones de soins palliatifs “Les doulas de la fin de vie : une pratique innovante Ă  dĂ©couvrir”, Ă©crit par Ariane Plaisance. 

Laura Bourgault

Crédit image: istockphoto/PIKSEL/1307432596

Source

  • National Geographic. Stacey Colino. Voici comment les doulas de fin de vie accompagnent leurs patients vers la mort. PubliĂ© le 27 fĂ©vrier 2024. En ligne : https://www.nationalgeographic.fr/photographie/culture-societe-deuil-voici-comment-les-doulas-de-fin-de-vie-accompagnent-leurs-patients-vers-la-mort#:~:text=Les%20doulas%20de%20fin%20de%20vie%20travaillent%20avec%20les%20personnes,la%20pand%C3%A9mie%20de%20COVID%2D19.
  • – Rawlings, D., Tieman, J., Miller‐Lewis, L. et Swetenham, K. (2019). What role do death doulas play in end‐of‐life care? A systematic review. Health & Social Care in the Community, 27(3), E82-E94. https://doi.org/10.1111/hsc.12660.
  • – Marshall, C.J., Nguyen, A., Arteaga, S. et al. Building Capacity for Research on Community Doula Care: A Stakeholder-Engaged Process in California. Matern Child Health J 28, 400–408 (2024). https://doi.org/10.1007/s10995-023-03883-2
  • – Miviludes (Mission interministĂ©rielle de vigilance et de lutte contre les dĂ©rives sectaires). Mission interministĂ©rielle de vigilance et de lutte contre les dĂ©rives sectaires. Rapport d’activitĂ© 2021. En ligne : https://www.miviludes.interieur.gouv.fr/sites/default/files/publications/francais/MIVILUDES-RAPPORT2021_web_%2027_04_2023%20_0.pdf